Conflit à l’UFDG : de l’indécence à vouloir exclure Bah Oury à la tentation de la CDD phobie ou mania

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D’entrée, il convient de marteler que le conflit interne qui agite l’UFGD n’interpelle pas plus le militant(e) et sympathisant de ce parti que le simple observateur de la politique guinéenne ou le citoyen lambda. D’où cette intervention.

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Les bisbilles, entre CDD et Bah Oury depuis le départ de ce denier en exil forcé, se muant crescendo en querelles de leadership, ont fini par déboucher sur un conflit politique ouvert qui clive à présent dangereusement le parti. À n'en pas douter, les responsables et comptables de cette situation explosive sont avant tout les états-majors des courants pro Bah Oury et CDD qui, par médias interposés et à force d’extrémisme, ont mené au bord du précipice leur parti.

 

Qu’a –t-on à gagner à défendre Bah Oury contre CDD se battant, à priori, pour le même idéal démocratique dans la même formation politique, mais visiblement antagoniques dans la manière de le faire ? Qu’a –t-on à voir Bah Oury viré du parti qu’il a lui-même fondé? Qui a intérêt à ce que Bah Oury ne retourne pas en Guinée ? L’UFDG s’est-elle assez solidarisée de son vice-président confiné à un exil inique? Surtout, l’UFDG a-t-elle assez assumé son rôle d’épouvantail face aux manœuvres anti-démocratiques et les dérives  du pouvoir en place?

 

Mais, plutôt que de se remettre en question, d'apaiser les tensions ou de s’évertuer à laver le linge sale en famille, à l’UFGD, l’on attise les rivalités internes à travers des déclarations chocs aussi futiles que zélées en faveur de son saint. Le mépris se le disputant souvent à la discourtoisie dans ces piteuses déclarations de nature à entamer le crédit des responsables politiques de l’UFGD qui se livrent à la vindicte publique contre les leurs.

 

Mine de rien, la ressemblance est tentante avec les rivalités bellicistes des rois africains à l’orée de la conquête coloniale, trop rivaux pour s’aviser de la nécessité de faire front commun contre l’envahisseur qui, tour à tour, finira par les reléguer imparablement tous sous sa coupe.

 

Pire, la foire d’empoigne entre frères ennemis de l’UFDG se nourrit dorénavant de tirades démagogiques et apologétiques à peine voilées de certains intellectuels guinéens soi-disant analystes politiques neutres. Piètres ersatz, au fait, des trublions pyromanes du PDG–RDA qui les a traumatisés, que chroniqueurs politiques lucides et impartiaux. L’intellectuel organique de Gramsci qui gamberge utilement passerait la semaine des quatre jeudis… En attendant, faut s’aplatir devant les fulgurances discursives de nos élites leaders d’opinion afin d’être en grâce.

 

«La culture PDG a aveuglé le Guinéen (…)  Le chef, le chef, le chef ! Le mangué, le mangué, le mangué, et sa désastreuse conséquence, le manguéisme ! Comment diable, réguler une société d’aujourd’hui ou produire une économie viable avec une conception aussi archaïque ?», disait Monenembo. Il y a un vrai travail d’éducation de l’intellectuel et du citoyen à faire en Guinée, pour se déprendre de l’esprit de lucre, de la mentalité, d’aliéné, tout aussi du culte de la personnalité. Tout un paradigme!

 

De cette guéguerre fratricide dont ni CDD ni Bah Oury ne sortira vainqueur, il faudrait redouter que la bataille rangée ne tourne au régionalisme. Fatal dénouement!…

 

Si Bah Oury pourrait ne pas être exempt de tout reproche dans la dissidence menée depuis Paris; parallèlement la tentation est grande, en prenant fait et cause pour CDD déjà porté au pinacle, d’idéaliser ce dernier dont, pourtant, les errements politiques ne sont pas sans lien  avec l’autocratie qui supplicie les Guinéens.

 

Au fait, le problème de Bah Oury c’est moins une question d’ego, comme certains se fourvoient à le croire, que de valeurs et de principes dans le combat démocratique de la part de la direction nationale de l’UFDG à Conakry. Et réclamer, de ce fait, la tête de Bah Oury reviendrait à faire preuve d’ingratitude politique et d’amnésie inacceptable. Or, à moins qu’on le sache, la politique, quoique réputée crasse, n’est pas tout à fait exempte de morale. Autrement, une éventuelle disgrâce de CDD (et Dieu sait qu’ «un bateau n’est pas assez large pour chavirer»), justifierait de faire fi de tout ce qu’il a apporté au parti et de le traiter comme le premier venu. On fonctionnerait de même-au strict opportunisme, sans être regardant de la vertu et du bon sens -avec tous ceux (militants, sympathisants ou autres) à qui le parti est redevable pour son épanouissement.

 

Le propos n’est pas non plus d’approuver Bah Oury ou CDD, au nom de la légitimité historique de fondateur ou de la fonction de président, à faire de l’UFDG leur propriété privée avec tous les attributs qui vont avec ou d’exhorter quiconque en position privilégiée à être au-dessus des statuts. Un parti politique est une structure, à priori, au-dessus des personnes, et les crises semblent faire partie de son fonctionnement normal. Cela est même signe de démocratie. Il reste cependant essentiel de pouvoir résoudre les différends pour se pérenniser. Alain Juppé, en France, en créant l’UMP, a su s’effacer par la suite au profit de Nicolas Sarkozy qui deviendra président de la  République.

 

Cautionner l’évincement de Bah Oury équivaudrait à s’accommoder de tout et son contraire en politique. Il n’est donc pas question de le débarquer. La faisabilité d’une telle entreprise semble d’ailleurs peu réaliste, d’autant qu’on verrait mal Bah Oury abandonner le parti qu’il a lui-même créé, tout comme ça paraitrait inimaginable de voir CDD poussé à la sortie de façon déloyale.

 

Pendant ce temps, sans qu’on s’en aperçoive peut-être, deux menaces guettent l’UFDG à l’avenir : l’éventuelle entrée en politique de Diallo Sadakadji et les coups tordus du système Condé.

 

In fine, vouloir exclure Bah Oury de l’UFDG s’avère tout autant absurde et désastreux que demander le départ de CDD, dans l’état actuel des choses. Seul un dialogue réconciliateur privilégiant un consensus politique entre les deux ténors de l’UFDG, et mené par des personnes neutres ou mandatées par Bah Oury et CDD, parait être le moyen d’éviter l’implosion du plus grand parti politique d’opposition de Guinée.

 

Pour peu qu’on lâche du lest des deux côtés, on y arrivera .Même si pour le moment, à l’UFDG, l’heure est plus aux sabres et aux épées qu’au  débat.

 

Oury Baldé

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