La prise récente par la Douane Guinéenne des médicaments contrefaits, est un acte hautement significatif dans la prévention des graves complications le plus souvent mortelles, causées par les substances toxiques utilisées par les criminelles de l’industrie de la contrefaçon médicamenteuse.
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La nocivité de l’acte m’oblige à réactualiser un article que j’avais publié il ya quelques années sur la contrefaçon des médicaments.
Selon l’institut international de recherche anti-contrefaçon de médicaments(IRACM) : En Afrique, les faux traitements contre le paludisme auraient entrainé la mort de 122350 enfants âgés de moins de 5 ans en 2013.
1 médicament sur 3, relève de la contrefaçon médicamenteuse.
Beaucoup de guinéens soit par ignorance dans la plupart des cas ou par effet de précarité financière, n’ont pas connaissance qu’une substance peut être aussi néfaste qu’une maladie grave lorsque les vices de fabrication et/ou de conservation sont potentiellement existants.
Certains diront que ces produits coûtent moins chers, ce n’est que la partie émergée de l’iceberg dans la mesure où la plupart de ces produits n’ont pas de principe actif, mieux peuvent contenir des composés chimiques d’une extrême nocivité pour les patients.
L’exemple de la fausse ampicilline qui était fabriquée par 2 chinois et leurs complices à Conakry, voir le cas récent du container de faux médicament intercepté par les hommes de l’excellent Sangaré de la Douane en partenariat avec le service chargé de la lutte contre la drogue et le grand banditisme, sont des faits assez évocateurs de l’ampleur du phénomène.
Toutes les catégories de médicaments sont incriminées : anti douleur, antibiotique, anti inflammatoire, en sirop, comprimé ou les formes injectables…
Toute commercialisation pharmaceutique doit obéir à une procédure d’autorisation de mise sur le marché. Ce qui garantit la qualité, la sécurité et l’efficacité du produit.
Tout produit qui ne respecte pas cette exigence, est une contrefaçon médicamenteuse.
Le citoyen doit savoir qu’un médicament n’est pas un produit comme les autres. Sa composition chimique peut être potentiellement un grave danger en termes de santé publique.
L’institut de recherche pour le développement a publié les résultats sur les antipaludéens au Cameroun, récoltés dans 132 sources de vente (marché, échoppes illégales, vente sous le manteau) entre 2001 et 2002.
L’analyse a permis de mettre en évidence que 38% ne contenaient en réalité soit aucun principe actif, soit un principe en quantité infinitésimale, soit d’autres substances inconnues et potentiellement dangereuses pour la santé.
Trois cas de figure :
1-Les produits contenant un principe actif sous dosé (quantité infime)
2-Les produits sans aucun principe actif
3- Les produits contenant les substances hautement toxiques, cancérogènes.
Un exemple à couper le souffle : Le sirop de paracétamol préparé avec du di éthylène glycol qui est un produit antigel(mortel) à la place du propylène glycol, a provoqué la mort de 89 personnes en Haïti et 30 nourrissons en Inde.
En 1990 à Kouroussa, en collaboration avec MSF, nous avons découvert dans une échoppe au marché, des capsules d’ampicilline contenant de la farine de maïs. Vous imaginez les conséquences chez un patient souffrant d’infection et utilisateur de ce faux médicament ! Souvent la mort ! Par ignorance, les sorciers et les diables sont mis sur le banc de l’accusation.
La contrefaçon médicamenteuse est une épidémie silencieuse qui frappe régulièrement nos populations avec une mortalité qui dépasse parfois celle des épidémies classiques.
La mort fait suite le plus souvent à une altération profonde aigue ou lente d’une ou plusieurs grandes fonctions de l’organisme comme l’insuffisance rénale, l’insuffisance cardiovasculaire, l’insuffisance hépatique (foie), l’insuffisance respiratoire, l’insuffisance pancréatique (diabète),les tumeurs (cancers) etc..
La Guinée ne dispose actuellement d’aucune étude mettant en lumière l’incidence et le taux de mortalité liés à la contrefaçon médicamenteuse.
Le ministère de la santé doit s’y atteler pour une meilleure visibilité statistique.
Véritable sujet de santé publique, la contrefaçon médicamenteuse doit demeurer un sujet de préoccupation majeure pour tous et singulièrement le pouvoir et les entreprises pharmaceutiques en collaboration avec la Douane et le service de lutte contre la drogue et le grand banditisme.
Les contrevenants doivent dorénavant subir toute la rigueur de la loi et sans complaisance.
Il faut saluer les services Douaniers à l’origine cette récente interception du container de faux médicaments.
En espérant la pérennité de cette action patriotique.
Bonne santé et bonne fête à tous.
Docteur Solian KONATE
Chirurgien Orthopédiste et traumatologue
Praticien Hospitalier, Centre Hospitalier du Haut Bugey
France.