Cartes d’électeurs : Djenabou Touré reconnaît des “dysfonctionnements”, mais la confiance reste ébranlée

Invitée sur le plateau de West Africa TV dans l’émission Au cœur de la transition, la Directrice Générale des Élections, Djenabou Touré, s’est expliquée sur les anomalies constatées dans la distribution des cartes d’électeurs. Tout en admettant des “dysfonctionnements”, elle balaie l’idée de fraude et parle d’“erreurs techniques”. Mais sur le terrain, les témoignages des électeurs et les réactions de l’opposition dressent un tableau moins rassurant.

Des ratés dans la distribution

“Il y a eu des dysfonctionnements au sein des commissions administratives à Conakry et dans certaines villes de l’intérieur”, reconnaît Mme Touré. Parmi les anomalies : une même personne pouvant retirer plusieurs cartes – parfois jusqu’à cinq –, et un classement alphabétique rarement respecté.

Autre problème soulevé : l’implication de personnes extérieures, non formées, parfois même des enfants de membres des commissions. “Des rappels à l’ordre ont été faits”, assure la Directrice, mais ces irrégularités alimentent les suspicions.

Témoignages d’électeurs mécontents

Dans la commune de Matoto, Mariama, 34 ans, raconte son désarroi :“Quand je suis allée chercher ma carte, on m’a dit qu’elle avait déjà été retirée. Par qui ? Je n’ai jamais eu de réponse. On m’a juste demandé d’attendre une réclamation. Mais si je n’ai pas ma carte le jour du vote, que va-t-il se passer ?”

À Labé, un autre électeur, Ousmane, s’étonne d’une erreur grossière :“Sur ma carte, je suis déclaré comme étant né dans un hôpital. Pourtant, je suis né à domicile. Ce n’est pas très grave peut-être, mais comment une telle erreur a pu passer alors que j’avais donné les informations exactes ?”

Ces témoignages mettent en lumière le fossé entre la version officielle et la réalité vécue par de nombreux citoyens.

Erreurs techniques ou failles systémiques ?

Mme Touré insiste : il ne s’agit pas de fraude organisée, mais de simples erreurs de saisie. Elle cite l’exemple d’une électrice enregistrée comme homme, ou d’un lieu de naissance mal précisé. “Ces erreurs n’affectent pas le droit de vote. La carte reste valide”, rassure-t-elle, rappelant qu’une période de deux semaines avait été prévue pour corriger les données.

Mais pour des acteurs de la société civile, ces explications ne suffisent pas. “Quand une seule personne sort d’un bureau avec cinq cartes, ce n’est plus une erreur, c’est une brèche qui fragilise tout le processus”, estime un observateur indépendant.

L’opposition hausse le ton

Du côté de l’opposition, la colère gronde. Un responsable politique fustige :“On veut minimiser ces problèmes, mais ce sont eux qui minent la confiance. Un fichier électoral n’a de valeur que s’il est fiable et transparent. Or aujourd’hui, nous avons l’impression que tout est fait dans la précipitation et sans contrôle sérieux.”

La désinformation comme facteur aggravant

Pour Mme Touré, la polémique est amplifiée par les réseaux sociaux. Elle dénonce la circulation de fausses cartes fabriquées avec l’intelligence artificielle, contenant des données inexistantes dans la base réelle. Mais si ces manipulations existent, elles ne suffisent pas à balayer les inquiétudes suscitées par les erreurs bien réelles du terrain.

Un optimisme officiel qui peine à convaincre

En conclusion, la Directrice affirme que le processus est “globalement réussi”, avec 6,7 millions d’électeurs enrôlés. Pourtant, les critiques de l’opposition et de la société civile rappellent une évidence : au-delà des chiffres, c’est la confiance des électeurs qui est en jeu.

Et comme le souligne Mariama, privée de carte à Matoto :“Si je ne peux pas voter parce que quelqu’un d’autre a pris ma carte, à quoi servent toutes leurs explications ?”

À suivre…

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