Immixtion dans la transition guinéenne : la faute de Louis Michel (par Balakhissa Samoura)

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GBK Louis Michel, Président de la Commission paritaire Union Européenne – Afrique Caraïbe Pacifique (UE-ACP) s’est senti le droit d’émettre un avis très critique sur les législatives en Guinée. Ce haut cadre de l’Union européenne a entre autres affirmé que les « irrégularités constatées » sont de nature à «  remettre en cause la crédibilité des résultats proclamés par la CENI »…

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En tant que telle cette appréciation pourrait n’être qu’une remarque inopportune ou maladroite de quelqu’un qui, certes, est fonctionnaire de l’Union européenne mais qui n’est pas directement impliqué dans l’organisation et l’appui aux élections guinéennes. On pourrait se contenter de dire à monsieur Michel : « de quoi je me mêle ? ».

Cependant la situation est plus préoccupante que cela. Monsieur Louis Michel est un soutien, sinon un allié inconditionnel de Cellou Dalein Diallo et Sydia Touré au nom de leur idéologie libérale commune. Ne sont-ils pas tous membres de l'Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe (ADLE) ?

Louis Michel a d’ailleurs ouvertement affiché son soutien à l’alliance CDD-Président lors de la présidentielle de 2010. Il le dit lui-même dans l’interview au cours de laquelle il remet en cause les résultats des législatives : « …M. Diallo représente le libéralisme, la tolérance, le respect du citoyen et de l'État de droit ainsi que le sens supérieur de l'État…C'est un homme compétent, intelligent qui incarne la liberté en action et le respect de l'autre…. si Monsieur Diallo et son parti arrive au pouvoir ils mèneront correctement la gestion du pays ». Pas moins que ça !

Cette sortie de Monsieur Michel appelle deux observations. La première est que, s’agissant d’un partenaire au développement de la Guinée, qui plus est, fortement impliqué dans notre processus de transition démocratique, on aurait pu s’attendre à un peu plus de réserve de la part d’un responsable du niveau de Louis Michel, surtout dans le contexte actuel guinéen.

Deuxièmement, on ne peut s’empêcher de voir une étrange coïncidence entre les propos de Louis Michel et le fameux rapport des observateurs de l’Union européenne du 30 septembre 2013.

Pour rappel, au lendemain des élections législatives, plusieurs organisations internationales, dont l’Union européenne, ont produit des rapports d’évaluation du scrutin. Ils ont tous pour point commun d’avoir constaté des dysfonctionnements et irrégularités mais dans des proportions qui ne remettaient pas en cause la sincérité du scrutin. Dans cet ensemble d’observateurs composé de l’OIF, l’UE, l’UA, la CEDEAO, la Mano River Union, l’ambassade des Etats-Unis, de la France, de l’Espagne, etc, seule l’Union européenne est allée jusqu’à remettre en cause la crédibilité du scrutin dans certaines circonscriptions. Le rapport de cette institution pousse le zèle jusqu’à dénoncer l’implication des membres du gouvernement dans la campagne électorale, comme si en Europe les ministres ne soutenaient pas leurs partis lors des échéances électorales !

Il est d’ailleurs étrange de noter à quel point le libellé du rapport ressemble étrangement aux récriminations que l’opposition multipliait pendant la campagne : « Dans le cadre de sacampagne, le Rassemblement du Peuple de Guinée (RPG)-Arc-en-ciel a bénéficié́ de moyens importants dont le recours massif aux véhicules et locaux de l’administration. La MOE UE a relevé́ la présence de personnalités du gouvernement directement impliquées dans la promotion du parti. »

Pendant longtemps, Philippe Van Damme, le représentant de la délégation de l’UE en Guinée, a été soupçonné d’avoir un parti pris pour Cellou Dalein Diallo. Il a pour mérite d’avoir su rester réservé sur des questions cruciales sans pour autant lever tous les doutes sur sa personne. C’est le minimum qu’on puisse exiger d’un haut fonctionnaire international. Cette obligation de réserve est encore plus importante pour quelqu’un du rang hiérarchique de Louis Michel, dont la position et les décisions peuvent avoir un impact direct sur la politique et le développement de notre pays. Que cette personnalité affiche de manière quasi-officielle son soutien à un adversaire politique d’un régime avec lequel il doit coopérer sur des questions stratégiques et au nom du contribuable européen est un manque de respect pour la Guinée. Qu’il adopte une position solidaire de ce même adversaire politique dans un dossier aussi sensible que nos élections législatives est une immixtion grave et intolérable dans les affaires internes guinéenne.  La question que l’on doit désormais se poser c’est celle de l’opportunité de confier son processus électoral à une institution incapable de faire respecter les principes élémentaires de neutralité à ses responsables.

 

Balakhissa Samoura

 

 

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