J’entame mon exposé en citant Vincent Delecroix : « Le seul vrai courage en politique consiste à être fidèle à ses engagements sur le long terme, en refusant la fragmentation de ses actions par l’instant ».
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Revenons au titre de cet article : Un mot est généralement vu comme un ensemble de sons qui peut jouer une fonction grammaticale dans une phrase. Je me sers de cette intuition grammaticale pour préciser tout d’abord ma vision métaphorique des termes (mot/mots et mal/maux) et ensuite développer mes idées sur l’évolution du multipartisme et de la démocratie à la guinéenne.
Mot est vu ici comme une appellation d’une chose, tandis que Mal indique dégât, inconvénient, perte, mauvais…
Les mots/appellations multipartisme et démocratie en Guinée étaient censés nous donner une diversité d’idéologies dans l’intérêt suprême de la nation. Ce qui sous-entend qu’en démocratie le but de créer un parti politique n’est pas de satisfaire son égo, mais plutôt d’apporter un plus à la population pour laquelle on prétend tant se battre. Mais hélas en Guinée, le mot multipartisme a perverti la démocratie en mal/dégât, car l’objectif de la création d’un parti politique est devenu un moyen de s’enrichir sur le dos du peuple. C’est ainsi certains cadres une fois à un poste de responsabilité, et s’ils ne sont plus aux affaires (même quand ils ont commis des dégâts à la suite de leur gestion des affaires publiques), ils créent des partis politiques, car s’estimant être faits pour un destin national.
Comme bon nombres de ces partis politiques ne sont pas fidèles à leurs engagements sur le long terme, qu’ils n’ont pas d’idéologie (vision) fixe, (tantôt ils sont socialistes, souvent libéraux, socio-démocrates, centristes voire modérés...), ils sont incapables d’expliquer ces idéologies, ou de les faire partager avec leurs militants et sympathisants. C’est ce qui explique la fragmentation de leurs actions politiques en ânerie politique. Quelques exemples des mots de leurs discours d’âneries politiques exposés en public,« je rejoins la mouvance, je dirai ce qui va et ce qui ne va pas, je me mets à disposition du président, mon pied ton pied, je suis opposant mais si…. et patati patata ». De tels idéaux cherchent leurs semblables dans les annales du discours politique en démocratie. Est-ce cela leurs programmes de société? C’est cet héritage politique qu’ils veulent léguer à la nouvelle génération ? Les maux qu’engendre une telle conduite politicienne empêchent la rigueur à l’organisation et l’aptitude au sacrifice pour servir son peuple. Mais il fait plutôt la part belle à la loyauté envers un homme pour des intérêts égoïstes.
A entendre ces mots/maux désastreux exposés en public que certains semble se glorifier, on est amené à poser des questions simples à ces politiciens :
1. quel est votre apport à l’installation de la démocratie dans notre pays ?
2. quel pays, quelle nation, quelle patrie voulez-vous forger pour vos enfants et petits-enfants ?
3. quel devenir préparez-vous pour vos descendants ?
Puisque nous n’avons pas compris le jeu démocratique, c’est ce qui explique sa mauvaise application dans le système de gouvernance de notre pays. Les paroles mielleuses, les billets de banque, l’argent des pagnes et T-shirts, les sacs de riz, le matériel de sono, les marmites des panneaux solaires, bref les achats de consciences se sont mus en programme de société des partis politiques. Malheureusement ces actes sont vus par beaucoup de Guinéens comme les mots/maux que le multipartisme et la démocratie ont apportés à la Guinée.
A la proclamation des résultats présidentiels d’octobre 2015, certains politiciens n’ont pas hésité un instant à manger leur chapeau. Ils sont été les premiers à retourner leur veste, pour s’agglutiner autour du président Condé pour solliciter ses bonnes grâces. Tout à coup, ils sont devenus les chantres de la défense du programme de société de celui qu’ils traitaient, il y a peu encore, d’incompétence, de tricheur, de Rmiste, de fossoyeur de la république, etc. Pis, ils veulent ravir aux fidèles partisans des heures difficiles du RPCé la moisson du pouvoir. Comme quoi la Guinée est devenue un pays où la conviction de la classe politique a foutu le camp pour laisser la place à l’esprit du gain facile et au partage du gâteau. De tel comportement politicien est le plus démotivant, désabusant, désorientant pour le citoyen.
Comme le président de la République dit qu’il connait à présent la mentalité des Guinéens, il doit joindre les actes à la parole, donner au nouveau premier des ministres toute latitude de gouverner en harmonie et en équilibre. Le président doit savoir que les préoccupations majeures de ses nouveaux partisans n’ont jamais été autre chose que leurs intérêts personnels. Ces kleptocrates sont toujours prêts à tout, même de s’allier au diable pourvu qu’ils y aient leur compte au bout. C’est ce manque de vision et de maturité politique qui font les maux du multipartisme et de la démocratie en Guinée. Déjà la presque totalité des hommes et femmes qui entourent le président aujourd’hui ont pratiquement tous travaillé ou collaboré avec les anciens régimes, d’autres ont même organisé l’arrestation et l’emprisonnement du président actuel. Il y a des hommes politiques qui ont poussé si loin l’outrecuidance, jusqu’à quitter derrière leur bannière du parti pour se fondre dans le RPG Arc-en-ciel. Ce qui est inadmissible en démocratie, car un chef de parti qui n’aspire pas à la magistrature suprême, et qui n’a aucune ambition politique ne mérite pas de diriger un parti politique. Mais en Guinée on crée un parti politique pour assurer ses lendemains et celui de ses progénitures.
La démocratique et le multipartisme guinéens ont besoin d’un engagement politique sur le long terme, de la conviction des acteurs politiques, et d’une opposition forte, capable de faire des propositions et présenter une alternative au pouvoir. Accepter la fragmentation des actions politiques c’est contribuer à l’affaiblissement de la démocratie et du multipartisme. Une opposition de façade n’a servi la démocratie nulle part au monde.
Le jeu démocratique offre la possibilité à l’opposition de critiquer, de contrôler et de proposer. En contrôlant la majorité, l’opposition défend et promeut ses droits, elle évite à la majorité de s’installer dans l’arbitraire. L’un des moyens approprié à l’action de contrôle est la critique de l’action et de la vision gouvernementales. L’opposition étant donné qu’elle aspire au pouvoir doit élaborer et diffuser ses propositions dans chacun des domaines de la vie nationale.
Moussa Bella Barry