Hier, l’opinion publique a été choquée de découvrir une vidéo amateure dans laquelle le prédicateur N’ko Nanfo Ismaila Diaby et toute sa famille sont violentés par des agents des forces de l’ordre en pleine célébration de la fête consacrant la fin du mois saint de Ramadan. Un comportement inacceptable dans un État de droit surtout de la part des agents qui sont censés avoir un comportement conforme au droit et n’utiliser la force que dans les cas prévus par la loi.
Au-delà de cette image choquante à laquelle on a assisté, il faut dire que Nanfo Diaby est victime d’un acharnement de la part d’un certain milieu religieux arabisé qui s’offusque de toute pratique religieuse contraire à la culture arabe.
La charge violente de la police de Kankan est une atteinte au principe fondamental de la laïcité et une entrave à la liberté d’exercice des cultes dans notre pays.
Atteinte à la laïcité
L’article 1er de notre constitution proclame et consacre la laïcité : “La Guinée est une république indépendante, souveraine, unitaire, laïque, indivisible, démocratique et sociale. Elle respecte toutes les croyances”.
Pour beaucoup, la laïcité est le fait pour l’Etat de ne pas prendre interférer dans les cultes. La laïcité va bien au-delà, elle n’est pas une absence de religions, c’est non seulement la séparation de la sphère étatique des religions, mais c’est également l’exercice libre de toutes les croyances.
En débarquant dans la concession familiale de Nanfo Diaby et en violentant et lui et ses proches, tout simplement parce qu’il se comporte différemment d’un point de vue religieux des autres, c’est une atteinte au principe de laïcité. Ce n’est pas la première fois que ce principe est bafoué au su et au vu de tout le monde. L’année dernière, il a été arrêté dans les mêmes circonstances pour avoir officié dans sa langue maternelle. S’en est suivi des mesures privatives de liberté qui ne reposent sur aucune obligation légale comme : l’interdiction de s’exprimer dans les médias de Kankan, de prêcher publiquement sa foi religieuse… Sa mosquée et d’autres biens ont été récemment caillassés par des hors la loi sans que cela n’emeuvent les autorités de Kankan.
Ces différentes décisions de la ligue islamique de Kankan qui, il faut le dire, ne sont pas conforment à l’état du droit en Guinée, et ces mesures font l’objet d’une contestation devant la plus haute juridiction judiciaire du pays, la cour suprême. La police et les autorités Kankanaises devraient s’abstenir de toute action en attendant la décision de la cour suprême.
Entrave au libre exercice des cultes
Le code pénal guinéen punit toute entrave au libre exercice des cultes (les articles 209 à 213 du code pénal. Les peines prévues vont d’un (1) à deux (2) ans d’emprisonnement et d’une amende de 50.000 à 150.000 Fg.
Les seules restrictions prévues au libre exercice des cultes sont celles qui concernent des troubles à l’ordre public que peuvent provoquer l’exercice d’un culte soit au travers d’écrits ou de discours séditieux ou incitant à la haine.
Le prédicateur Nanfo Diaby a tellement été courtois et respectueux de l’autorité qu’il a accepté les décisions de la ligue de Kankan, malgré leur caractère litigieux. Ce qui se passe à son sujet est un acharnement contre sa propre personne, ses pensées et contre une certaine philosophie intellectuelle. Il a accepté de prier chez lui malgré tout, des agens viennent le violenter dans sa propre concession et sans mandat de perquisition en bonne et due forme, surtout que les agents qui l’ont arrêté ont affirmé être à la recherche d’un voleur.
Le cas Nanfo doit être apprécié à la lumière du droit et non de la religion. Je n’exprime pas un point de vue religieux mais c’est une question avant tout juridique. La Guinée est certes une société fortement religieuse mais notre État est laïc et il garantit le libre exercice des cultes.
Alexandre Naïny BERETE