C'est un texte très intéressant que notre compatriote Mamadi Dioubaté offre aux lecteurs. C'est un aspect presque inconnu d'Alphonse de Lamartine (1790-1869), rendant hommage au Prophète Mohammed (PSL). Lamartine n'est connu que comme poète romantique et homme politique français du XIXe siècle.
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On ne trouve trace de l'hommage qu'exhume ici Mamadi Dioubaté dans aucune des principales œuvres connues de cet écrivain que sont : Les méditations poétiques (1820), Les nouvelles méditations » (1823), Les harmonies poétiques et religieuses » (1830), A Némésis (1831), Gethsémani ou la mort de Julia (1834) , Jocelyn (1836) , Les recueillements poétiques (1839), etc. Les citations que cite Mamadi Dioubaté ne peuvent être tirées que du Voyage en Orient (1835), en 2 volumes. L'auteur a effectivement fait un voyage en Orient en 1832-1833, avec sa femme et SA fille Julia, âgée de 11 ans, son unique enfant, qui mourut à Beyrouth en décembre 1832. Lamartine en conçut une immense douleur (voir Getsémani, ou la mort de Julia). Douleur qui l'aurait amené à réfléchir sur les enseignements d'une autre religion que la sienne?… Toujours est-il que les hommages qu'il rend au Prophète Muhammad (PSL) n'était pas courant de la part d'Occidentaux en son temps, où le terme utilisé de mahometans était plutôt méprisant, comme l'était le terme de nazaréens utilisé par les musulmans pour désigner les chrétiens. Le mérite de la démarche de Lamartine n'en demeure pas moins grand.
Au cours de ce voyage, il a visité Damas, Jérusalem, les ruines de Baalbek (Liban) et fit le retour par Constantinople (aujourd'hui Istanbul, Turquie). Tout cela lui a permis, sans doute, de s'imprégner de la culture du monde musulman. Il est curieux d'ailleurs de comparer le Voyage en Orient de Lamartine avec l’Itinéraire de Paris à Jérusalem (1811) de Chateaubriand ou avec Voyage en Orient (1851) de Gérard de Nerval. Les voyages étaient fort à la mode chez des écrivains du XIXe siècle, non pas toujours à la recherche d'une spiritualité pour tous. Mais certains, cependant, étaient attirés par l'Orient dans le souvenir des Croisades qui avaient été des expéditions parties d'Occident du XIe au XIIIe siècle pour délivrer les Lieux saints du christianisme en Palestine de la domination musulmane , puis pour assurer leur défense.
Lamartine, au cours de ce périple a pu être sensible à la spiritualité de l'islam pour rendre hommage à son messager. C'est donc une bonne initiative de rendre compte de ses commentaires, comme le fait Mamadi Dioubaté. Mais puisque celui-ci parle de recherche, avec Lansana Kouyaté, au départ de son texte, je crois qu'il aurait dû être plus rigoureux en citant entre parenthèses, après chaque citation, les sources de son information. Cela non pas seulement pour Lamartine, (Voyage en Orient, 1835 ?), mais aussi pour tous les grands hommes qu'il cite dans sa recherche. Les citations précises permettent à des lecteurs curieux d'en savoir plus ou de vérifier l'exactitude de la citation. Un certain nombre de lecteurs n'ont, du reste, pas manqué de demander des précisions sur « La Loi Sayfoulaye » que Mamadi Dioubaté devrait leur fournir.
Par ailleurs, quand il parle de la lutte contre le fondamentalisme religieux sous le régime du PDG, cela demande débats et dépasse le cadre du militantisme politicien. En effet, malgré la nature laïque du régime guinéen, le pouvoir de Sékou Touré se servait constamment, à partir d'une période, de la religion comme instrument auxiliaire d'embrigadement des masses populaires. A chaque occasion, les mosquées étaient officiellement commandées par le pouvoir politique d'organiser des prières pour solliciter le Tout-Puissant Allah pour la réalisation des vœux du pouvoir. Les exemples sont nombreux comme le cas de l’élection présidentielle française de 1981. A cette date, le pouvoir guinéen était en froid avec l'opposant François Mitterrand en France. Il a donc été demander à toutes les mosquées de Guinée de prier pour la réélection de Valéry Giscard d'Estaing contre le candidat François Mitterrand. Mais c'est ce dernier qui l'emporta en mai 1981.
Très souvent des réunions de travail de techniciens de ministères sont précédées de la lecture du Saint Coran alors même que tous les participants ne sont pas musulmans. Ce type de mystification des masses a constamment été utilisé par le PDG comme lors de la 12e édition de la Coupe Kwame Nkrumah de football en 1976. L'équipe guinéenne, le Hafia Football Club, rencontre à Conakry le 7 novembre 1976, l'ASEC d'Abidjan (Association sportive des employés de commerce). Le match est gagné par le Hafia F.C. (5-0). Le président Sékou Touré explique dans la presse du parti, au cours d'un discours fleuve, la signification hautement révolutionnaire de cette victoire des Guinéens sur les Ivoiriens. C'est, dit-il, « …la victoire de l'Afrique combattante sur l'impérialisme et ses agents africains… La victoire de l'islam sur le fétichisme… A vrai, ajoute le président, toutes les mosquées de Guinée se sont mobilisées pour prier le Tout-Puissant afin que l'équipe qui incarne les valeurs positives l'emporte. Et notre joie est que cette équipe fut le Hafia, ce qui est pour nous, une démonstration de la justesse des valeurs défendues par le Hafia » (voir Horoya, N° 2248 du 14 au 20 novembre 1976, pages 4-13). On peut multiplier les exemples dans lesquels les imams et les mosquées étaient mêlés à tout. Ceci explique qu'au long des années, certains religieux musulmans ont cru qu'ils pouvaient régenter la société avec l'aide de pays étrangers. Avant eux, l'islam en Guinée comme dans des pays voisins n'avait pas eu une visée politique aussi agressive que de nos jours. C'est pourquoi on ne peut qu'approuver l'alerte de Mamadi Dioubaté en l'expurgeant du psittacisme doctrinal qui altère les faits.
Ansoumane Doré
Dijon, France