Communiqué de Pottal-Fii-Bhantal Fouta-Djallon sur les travaux de la commission de réconciliation nationale.

Pottal fii Bhantal
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Pottal fii BhantalLes membres de Pottal-Fii-Bhantal ont pris connaissance de la conclusion des travaux  sur la « réconciliation nationale » qui a été lancée il y  cinq ans par le gouvernement guinéen. Les recommandations faites par la commission sont décevantes, reflètent la façon dont les travaux ont été inspirés et conduits ainsi que le choix des principaux  membres de la commission. {jcomments on}
 
Pottal-Fii-Bhantal dénonce sans ambages les travaux de la commission et rejette ses conclusions et ses recommandations.   
 
La campagne de réconciliation veut entériner l’idée de conflits ethniques et régionaux larvés entre les populations guinéennes. Les faits historiques de la Guinée prouvent le contraire.  La violence et les affrontements en Guinée ont de tout temps été le fait des forces de sécurité ou de milices manipulées par les régimes guinéens. La violence a toujours été dirigée contre des citoyens désarmés. Parler de réconciliation au lieu de justice en pareilles circonstances n’est qu’une grossière manipulation politicienne qui vise à entretenir des tensions sociales afin de désarmer et diviser les forces sociales. La campagne de réconciliation nationale sert à escamoter l’impunité dont ont toujours jouie les criminels, auteurs des nombreuses violations des droits de l’homme dans notre histoire.    
 
Les dictatures guinéennes –celle d’Alpha Condé en particulier – absolvent des crimes individuels afin de laisser planer des culpabilisations collectives diffuses sur des ethnies et des groupes sociaux ou  régionaux. Cette pratique est exploitée par ricochet par la classe politique pour  masquer l’incurie, la médiocrité et la corruption propres à toutes les dictatures. L’ethnocentrisme est ainsi devenu l’idéologie de gouvernement des régimes guinéens. Mr. Alpha Condé a prouvé être son adepte des plus  zélés. Depuis son accession au pouvoir, le président guinéen s’est acharné systématiquement à appliquer cette idéologie sur le champ social guinéen pour semer  divisions et discordes  sociales. Il protège dans les rangs de l’administration des fonctionnaires et décorent des agents des forces de sécurité accusés de crime contre l’humanité tout en doublant son forfait par le mépris des victimes. Il est  ironique qu’un tel président  parle de réconciliation. Nonobstant son rôle de premier magistrat garant de la constitution, le président prêche que toute le monde est coupable et tout le monde est innocent en même temps. Il fait dans  l’amalgame  pour entériner le déni de justice dans notre pays en prétendant que les « bourreaux d’hier sont les victimes d’aujourd’hui et vice versa… ». L’histoire des régimes répressifs est pleine d’exemples de tortionnaires qui deviennent des victimes de leur système. Le président guinéen utilise  ces exemples pour virtuellement excuser les bourreaux,  souiller  la mémoire des victimes innocentes et  brouiller  les faits historiques de la nation. Mettre dans le même sac des tortionnaires notoires comme Siaka Touré avec leurs victimes innocentes est immoral.
 
Les déclarations du président guinéen suffiraient pour invalider la  manœuvre politicienne qu’est la campagne de réconciliation.  Le choix de deux chefs religieux comme dirigeants  de la commission répond à une logique grossière de manipulation de la religion. De la part du chef de l’état guinéen, on note une volonté manifeste de  remuer le couteau dans les plaies mal fermées afin de perpétuer l’éclatement actuel des forces sociales.  Cette disposition d’esprit explique la nomination comme co-président de la commission de réconciliation, de l’archevêque Vincent Coulibaly qui a nié en publique les crimes du 28 Septembre 2009.  Le second  co-président,  Elhadj Mamadou Saliou Camara qui s’était forgé une image d’indépendance et de franc-parler s’est disqualifié avec des propos  dithyrambiques – indignes d’un leader moral et religieux – qui font de Mr.  Alpha Condé de père de la nation et de ses adversaires politiques.
 
Il est regrettable que la classe politique guinéenne et la société civile célèbrent ou acceptent avec mutisme les recommandations de la commission. Les forces qui prônent le changement et la démocratie dans notre pays devraient comprendre une fois pour toute qu’il n’y a aucun gain politique sans la justice. Elles devraient baser leurs actions sur ce principe.  Le laxisme sur le front de l’impunité est la garantie de renforcement de la dictature. Il ruine les chances d’une alternance politique crédible et crée les conditions de la perpétuation des mascarades électorales avec leurs lots de violences. Quant à  l’assemblée nationale, elle aura failli encore une fois à son devoir de contrôleur et de garant de la bonne conduite de l’exécutif et des charges confiées à des citoyens.
 
Si le besoin de réconciliation était une nécessité ou une préoccupation sérieuse du gouvernement, le processus et les pratiques auraient dû commencer par des sanctions sur les crimes récents. En outre, la réconciliation devrait s’inspirer des commissions de vérité, justice et de réconciliation à travers le monde. Dans tous ces exemples de réconciliation nationale, le processus a été centré sur les sévices subis par les victimes et le repentir des accusés avec l’assistance de juristes et de spécialistes des droits de l’homme.  En Guinée, le processus aura brillé par des conciliabules, des auditions sélectives,  des recommandations de prière et d’expiation collective au lieu et à la place d’instructions judiciaires avec des inculpations personnelles et des protocoles rigoureux de découverte des faits. Le résultat est qu’aujourd’hui les accusés sont plus que jamais arrogants et prompts à déclarer quand on les interpelle qu’il y a plus coupables qu’eux.
 
Eût égard aux spécificités de la violence politique en Guinée le programme de réconciliation nationale engagé par le  gouvernement ne fera qui ruiner d’avantage les chances de construction d’un état de droit qui passe par la gestion saine du passé de violences politiques en Guinée.   Ce programme doit être rejeté. Au lieu et à la place, nous en appelons à toutes nos sections pour saisir  l’organisation afin d’organiser des débats d’information et d’éducation sur la nécessité de la justice, de la vérité et l’éradication de l’impunité. Nous invitons les leaders d’opinion, les  organisations des victimes et de défense des droits de l’homme à mobiliser les efforts sur  l’exigence  de traduction en justice des accusés de crimes. Cette étape incontournable devra être suivie de l’organisation d’une consultation nationale de vérité et de justice sans laquelle les  ferments d’un passé non gérée continueront à attenter  à l’avenir.
La commission  centrale de Pottal-Fii-Bhantal Fouta-Djallon
 
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