A- Deux exemples de Fondation et de Fédération
A1- L’extraordinaire dynastie des Cissé/Tounkara (Voir Bulletin N° 12)
A2- Un Extraordinaire Etat Fédéral au cœur du Moyen-âge : LE ‘’MANDEN’’
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PETIT RAPPEL : La prééminence du Royaume de Sosso suite à la dislocation de l’Empire de Wâdou, a été marquée, comme on l’a compris dans mon précédent article, par des razzias incessantes dans toutes les Provinces et Cités environnantes. Ce qui s’était forcément traduit aussi par des Vagues de départs, de fuites et d’exodes massifs de Populations. ‘’Le vent qui a emporté le Mortier ne peut épargner le pilon’’, dit le proverbe N’ko : Mansa Dankaran-Touman, le Roi de Niani, s’était bien enfui lui-même, avec toutes celles et tous ceux qui l’avaient suivi !
On sait que le règne de Soumaoro Kanté a duré pas moins de trente ans, jusqu’en l’an 1235, date de sa disparition pendant la Bataille de KIRINA. Or, à l’époque, il est clair que les ‘’Vertus’’ d’une Union, d’une Alliance, d’une Coalition des petits Etats de la Région, qui étaient victimes de ses exactions et cruautés cycliques, récurrentes, ces ‘’Vertus’’, dis-je, n’étaient pas encore perçues comme indispensables pour Résister au Roi Sorcier, ni à plus forte raison pour l’attaquer ou le vaincre. Chacun, dans son isolement, subissait ses extravagances destructrices sans pouvoir mais, Dankaran-Touman, lui, par jalousie, n’avait même pas pu s’attacher l’énorme puissance de son puînée, dont la venue avait pourtant été annoncée par tous les Mages et Devins de la Contrée, SOGOLON DJATA. Il avait ramené tout le Sens Historique du Pouvoir à une dimension interpersonnelle microscopique. Exactement comme l’ont fait, et le font, les successeurs de Ahmed Sékou Touré en Guinée, en ramenant l’exceptionnelle, la phénoménale et universelle Historicité de l’Epopée AST, à un simple sujet de rhétorique caricaturale. Dankaran-Touman a payé la facture de sa ‘’contre-vision’’ historique, on l’a bien vu ! On a vu aussi Lansana Conté sortir de la Scène comme il est sorti: péniblement longuement…Si quelqu’un souhaite pour lui-même une telle sortie, comparablement à celle d’AST, c’est une question de choix historique ! On a vu enfin les deux ‘’Présidents’’ de Transition du style ‘’Militaires Contéïstes’’, partir eux-aussi du Pouvoir, pour se retrouver dans leurs positions actuelles ! Quand une Personne se laisse fourvoyer par les bas-sentiments, au point d’oublier l’impuissance totale dans laquelle elle se trouvera elle-même, tôt ou tard, face à sa propre ‘’Sortie de Scène’’, une ‘’Résultante’’ que Seul Dieu maîtrise, cette Personne aura alors, tout simplement, Raté LE COCHE de la GRANDEUR HISTORIQUE. Or, ça, c’est IRREVERSIBLE. Comme pour Mansa Dankaran-Touman, et ses pareils à l’infini.
Le Royaume de Niani, sous la clairvoyante Transition du Monumental Griot-Diplomate, Djankouman-Douga (ou Nyankouman-Doua), celui à qui Soumaoro a attribué ‘’son’’ Balafon en lui disant : ‘’Balâ fö sèguè’’, le Royaume de Niani avait alors été historiquement inspiré d’envoyer une importante Mission auprès de Soundiata, qui venait de pleurer et d’enterrer sa mère Sogolon dans son exil à NEMA, pour l’inviter à venir sauver le Royaume de ses Ancêtres de la dislocation.
2 – SOUNDIATA KEITA, LE FEDERATEUR.
A cette époque-là, il y avait dans cette Sous-Région, des Royaumes, des Provinces et des Hommes dont je vais citer certains. C’est à titre purement indicatif, parce que la zone concernée allait du Sahara à l’Atlantique.
Il y avait donc : le NIANI des Kéïta ; le DO et le KRI des Kondé ou Condé ; l’énorme DIA, tant des Diâ-Warâ, des Diâlonkâ, des Diâkanké, que des Diâfounounka ; le SIBI de Kamandjan et le TABON de Whana (ou Nhganah) Fran, tous deux Kamara ou Camara ; le WADOU des Cissé et le NEMA des Tounkara ;le KANGABA, le KANIAGA ,les BOUGOUNI et SEGOU, le GAO des Peuples BAMBARA, DOGON, KOROBORO, SENOUFO et SONGHOI… ; le TORON et DOURA des TOURAMAGAN-SI ; tout le BATEH (l’Entre-Fleuves) ;puis le HAMANA , et le BALYA ; le WOULADAH ; le SANKARAN , ou encore le KOURANKOH ‘’Télé tani lôlou tâman’’, (vaste territoire de 15jours de marche) ; le pays Lélé ; les Hauts Plateaux du Centre-Ouest, Sièges des mythiques ROYAUMES des ‘’MANGAS’’ Dialonkés, allant des zones actuelles de LANSANAYA et de GAGNAKALY dans DINGUIRAYE, jusqu'à la Côte Atlantique ; on a enfin (dans ce texte) tous les PEUPLES de nos Forêts des actuels Guinée, Côte d’Ivoire, Sénégal, Casamance et NGâbou, etc.
Les densités démographiques de l’époque n’étaient pas fortes ; comme pour toutes les Régions du Monde. Il est établi, à titre d’exemple, qu’à l’époque de la Révélation Coranique au VIIème siècle, l’Humanité entière comptait environ Cinq Cents Millions (500 000 000) d’habitants ! Chine y comprise ! Cependant, qu’on veuille se réapproprier les Récits des Batailles Epiques d’Alexandre le Grand ou d’Assourbanipal, et on pourra se convaincre de la qualité de Conquérants hors du commun des Fondateurs de nos premières Cités , et des Ensembles plus grands que furent nos Provinces, Royaumes et Empires. Pourtant, le Monde était aussi grand à l’époque qu’il l’est aujourd’hui.
Pour notre Sous-Région, toutes les Entités que j’ai citées ici, celles que j’ai oubliées, et celles dont je n’ai même jamais entendu parler, avaient toutes subi la domination et les Incursions incessantes de Soumaoro Kanté.
Tous ceux qui ont tant soit peu, entendu parler de cette époque, savent tous que les Devins, Oracles, Voyants, etc, qui consultaient les éléments de la Nature : cauris, pierres ou sable ; ou ceux qui ‘’entendaient’’ les langages d’animaux ou d’oiseaux, avaient tous annoncé la ‘’venue’’ de Soundiata le Grand. Or, tous les Meneurs d’Hommes de l’époque en avaient entendu parler eux-aussi. Eux surtout, qui étaient si rarement surpris par ce qui pouvait arriver.
Ainsi, dès que le retour d’exil de Soundiata avait eu lieu, et que celui-ci avait aussitôt fait part de son souhait d’entrer en concertation avec tous ceux qui étaient concernés ou préoccupés par la situation dramatique de la Contrée, plusieurs Réunions au sommet avaient été organisées. La plus importante et la dernière de ces Réunions d’avant les hostilités, fut celle de DAKADIALA. C’est là que fut scellé le PACTE du Rassemblement, de la Coalition, et la Mise en Commun de toutes les Forces de la Contrée. Ce fut ce qu’on a appelé le ‘’MADEN ou MANDEN’’.
‘’Kélén-kélén bila tè fénfén di fö nimisa !’’: Il s’agit d’une des Maximes fondatrices de la Coalition, qui signifie exactement : ‘’l’isolement n’est jamais qu’une source de regrets’’.
‘’Könöö la dênin’ dé mankan kabon’’ : ‘’C’est l’envol (ou le rassemblement) d’un grand nombre d’oiseaux qui est bruyant’’.
Le ‘’Mandén’’, (la ‘’Coalition’’ ou la ‘’Fédération’’), c’est le Nom Symbolique que les ‘’Fédérés’’ ou ‘’Coalisés’’, les ‘’MANDEN-KA’’ (KA pour HABITANT) donnèrent à l’Ensemble du Territoire Unifié de leurs Etats. C'est-à-dire, une Fédération d’une diversité inouïe ; aux plans linguistique et dialectal notamment. Prenez par exemple les Markas, les Sounounkés, les Köröbörös et autres Dogons, qui ont développé tant de nuances du Sarakollé originel, qu’ils ont cessé de se comprendre entre eux. Prenez les Dialonkés ou les Peuples de la Forêt Tropicale (Agnis, Akans, Kpèlès, Lomas, Kissi), ou encore les Peuples Yoroubas, Haoussas, et Mossis. C’est tous ceux-là qui étaient les MANDENKAS. Malheureusement ( !?!) le mot par lequel l’appellation a été faite, par lequel le Nom des Coalisés a été fixé, est un mot du Kangbè, le ‘’CLAIR-PARLER’’, propre au Ggèkan-DYAMANA, c'est-à-dire le ‘’CLAIR-PAYS’’, (pour désigner la SAVANE pré sahélienne).
Les Français en arrivant, commencèrent par déformer le nom MANDENKA en Malinké. Ce qui, historiquement et phonétiquement, ne signifie RIEN pour nous. Malheureusement (encore !), nos Elites sont caractérisées par un manque de rigueur et une légèreté dévastatrices de l’énorme, du colossal PATRIMOINE d’UNIFICATION, de PARTAGE et de Convivialité pluriséculaire que KOUROUKAN FOUGA a constitué pour notre Sous-Continent.
Les Blancs ont dit ‘’Malinkés’’, en désignant la composante Kangbè du vaste NKO. Une composante qu’ils ont ensuite diabolisée petit à petit, au point que d’autres composantes du même NKO, comme les KONIAKAS ou les DIAKANKAS, s’en sont éloignés, ou ont manifesté envers elle une hostilité parfois virulente. ‘’Nous’’ avons répété, nous aussi, ‘’Malinkés !’’, en nous moulant dedans sottement, et souvent avec un orgueil idiot.
3- LA VICTOIRE DE KIRINA ET LA CONFERENCE DE KOUROUKAN FOUGA
3.1 Les Hostilités
Il va sans dire que Sosso-Soumaoro avait suivi tous ces préparatifs en fin connaisseur, et qu’il n’était nullement inactif lui-aussi. Il ne faut jamais oublier qu’il était alors l’incarnation même de la Puissance Invincible. Il a été et restera dans toute notre Histoire le plus grand Roi-Sorcier Noir. Il était réputé d’avoir le don d’ubiquité et de transformation. Il pouvait disparaître et réapparaître de part en part sur tous les champs de bataille, riant aux éclats dans le dos de tous ceux qui étaient certains, d’avoir tiré sur lui à bout portant, au fusil ou à l’arc, ou qui étaient assurés de lui avoir plongé le sabre dans le corps.
Le problème pour lui cette fois-là, fut qu’il était seul, face à tous les autres Whanahs (ou Nhganahs) d’Afrique de l’Ouest. Et Dieu sait qu’il y en avait ! Regardez : KAMANDJAN CAMARA, l’homme qui, d’un cri, ouvrit une brèche dans le Mont SIBI, dont son Royaume portait le nom ; et FRAN, le Nhganah (ou Whanah) de TABON, dont le territoire fut celui où Soumaoro Kanté avait subi le premier choc frontal avec les Mandénkas, face auxquels il avait dû reculer dans l’humiliation ; et le colossal et intrépide TOURAMAGAN TRAORE, le plus grand conquérant de l’époque, celui qui était allé vaincre DJOLOFIN MANSA, le Roi de CAYOR, chez lui, et qui en avait rapporté la tête au bout d’une pique, à l’Investiture de SOUDIATA KEITA en tant que Commandant en Chef des Forces du MADEN ; et encore FAKOLI KOROMA, le neveu de Soumaoro, dont celui ci avait détourné l’unique épouse, Kéléya-Konko, FAKOLI, l’Ancêtre des Guérisseurs, des Justiciers er Redresseurs des Torts par la MYSTIQUE en Afrique de l’Ouest. Et les cinq (05) Guerriers de Dieu, Combattants des Nuits Blanches consacrées aux Invocations Divines : SENGBEN-MARA Cissé, SIRIMAN-KANDET Touré, TOMBONDO-MAKANDJAN Bérété, SERE-BOUKARY Diané et SAÏD-KOMAH SYLLA, les 05 MANDENS-MORIS. NON ! Face à lui, Soumaoro avait aussi des HOMMES, et pas des moindres.
NANA-TRIBAN, la demi-sœur et admiratrice convaincue de la Destinée Exceptionnelle de SOUNDJATA, avait accepté elle-aussi d’épouser Soumaoro en vue de percer le secret de son invulnérabilité, pour servir justement ce grand destin auquel se confondait celui de leur Royaume tout entier.
Bref, les MANDENKAS déclenchèrent les hostilités avec l’assurance d’une Victoire éclatante et légendaire. Elles se déroulèrent en cinq (05) Batailles. Cinq Grandes Batailles, épiques et, somme toute, fondatrices de l’Immortel MANDEN.
La Première Bataille, hautement symbolique du ras-le-bol des Opprimés, ce fut, comme je l’ai dit plus haut, le choc frontal, bref et brutal de TABON. A la 2ème Bataille, Soumaoro était venu à NIANI pour vaincre ; cela dura neuf jours, au bout desquels il dut battre en retraite.
Quant aux Troisième et quatrième Batailles, elles eurent respectivement lieu à NEGUEBORIA et à KINTINGNA. Enfin, la Cinquième et Ultime Bataille fut celle de KIRINA en l’an 1235. SOUMAORO KANTE y subit la Défaite la plus cuisante ! Mais le ROI-SORCIER ne fut ni tué, ni capturé : il s’évanouit dans la Nature sans laisser de trace.
2-PETIT INTERMEDE POUR CONCLURE CET EPISODE.
Nous sommes en Afrique Noire, où de singulières valeurs ont existé et ont caractérisé plein de gens. Moi, j’ai débuté ma vie active en tant qu’Enseignant du Secondaire en zone rurale. C’était au pays KISSI, tout en profondeur. Un certain nombre de ‘’légendes’’ m’y ont été rapportées. Comme celle de ce vieux patriarche, qui était devenu un grabataire sans espoir, à l’intérieur de son imposante case, où sa nombreuse famille l’entourait d’attentions et de soins à tout moment.
Un matin, comme par extraordinaire, l’immense concession s’était retrouvée vide de tout habitant, sauf le seul vieux malade! Comme si tout le monde l’avait abandonné ! Même son fils aîné qui ne le quittait pratiquement plus depuis des années, était lui-aussi allé effectuer ce jour-là, une course à pied dans un village voisin. Soucieux cependant de l’état de son père, il avait mis moitié moins de temps qu’il en fallait pour son voyage. Revenu à toute allure, il s’était précipité au chevet de son malade. Quelle ne fut pas sa surprise de trouver vide le lit de son père…Alors qu’il avait déjà remarqué qu’il n’y avait pas âme qui vive dans toute la grande concession familiale ! Voyant ouverte la petite porte de la case donnant sur l’arrière-cour et les lieux d’aisance, il s’y était élancé aussitôt. Ce qu’il vit et entendit alors le sidéra : surmontant le puissant tronc d’un arbre auquel ils étaient reliés et confondus en un ’’Tout’’, la poitrine, les bras et la tête de son père ! Ce dernier s’était alors exclamé d’une voix d’outre-tombe : ‘’Eh ! pô. A hinn’ ?’’ ! Ah ! M’Bâ, tyouwa yâ, mâ loyiyâ nika !’’ C’est en Kissien (moi je suis Guinéen !), et ça veut dire : ‘’Eh ! Fiston. Tu es venu ? Bon ! Prends-moi à présent et fais-moi rentrer dans la case’’. Reprenant aussitôt sa forme humaine, le vieux s’était écroulé dans les bras de son fils en rendant son dernier soupir.
Alors, question : n’était-il pas, ce Vieux, un ‘’Maître’’ de la Nature, capable de se fondre dans le Monde Végétal, de l’intégrer ?… En tout cas, le phénomène de la transmutation ‘’Homme-Animal’’, ‘’Homme-Végétal’’ ou ‘’Homme-Autres Eléments Naturels’’ (tourbillons, termitières, etc), ce phénomène n’était jamais contesté en Afrique Noire. On peut encore s’en informer ici ou là.
Je pense qu’il est plus pédagogique de suspendre ici cette Relation, en attendant le prochain ‘’Bulletin’’, qui conclura sur l’Extraordinaire Fondation de cet Empire, dont la GRANDEUR a résisté et résistera toujours à toutes les vissicitudes de notre Histoire : parce qu’il s’agit d’une GRANDEUR dont l’Intemporalité a pour Fondement la Recherche et la Maîtrise de la SOCIABILITE HUMAINE.
Nous parlerons de KOUROUKAN-FOUGA dans le prochain ‘’Bulletin’’, s’il plaît à Dieu. Et qu’il LUI plaise, âmine.
Soub’ hânallâhi Wabihamdihi,astakh’firoullâhi Wa atoûbou ilaïhi
Wa sallallâhou alâ Seyidinâ Mouhammadin, Wa alâ âlihî, Wa Sahabihî Wassalim.
Conakry, le 14 Mars 2014
Aly Bocar Cissé Professeur et Administrateur Civil à la Retraite
Tél : 664-33-37-70/ 622-27-88-89/ 657-38-53-89
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