Crise au RPG-Arc-en-ciel : La grande braderie !

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La vie politique guinéenne donne lieu, ces derniers jours, à une succession de déclarations et de prises de position troublantes. Samedi 5 décembre 2015, l’honorable Sidya Touré affirmait, à la suite de son rapprochement du Professeur Alpha Condé : «Le président Alpha Condé m’a dit : toi et moi, ça fait longtemps qu’on se connaît. On a eu cinq ans de débats. Je souhaiterais, les cinq années que je vais avoir, que je puisse faire de bonnes réalisations…

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Je lui ai répondu que pour cela, il faudrait faire des réformes, et elles sont difficiles. Il m’a dit : je ne dois rien à personne. Cette fois-ci, je veux mener un travail qui va me permettre de laisser aussi mon nom en Guinée». Or ce propos ne correspond pas au discours traditionnel de l’honorable Sidya Touré, par exemple à sa volonté de discréditer le Professeur Alpha Condé en certaines occasions. En avril 2014, il affirmait : «Alpha Condé c’est quelqu’un qui vit 30 ans en arrière avec des idées passées». En juillet 2014 il disait que : «Je n’ai pas vu une maison d’Alpha Condé avant sa prise du pouvoir. Je veux bien qu’il me dise ce qu’il faisait avant de devenir président de la République.»

Autre étrangeté: En octobre 2015, Monsieur Bah Oury, vice-président de l’UFDG, déclarait, au sujet du Président de son parti politique, l’honorable Cellou Dalein Diallo : «El Hadj Cellou Dalein est le président de l’UFDG depuis novembre 2007, il a participé à l’élection présidentielle de 2010, l’élection législative de 2013 et l’élection présidentielle de 2015. Il faut qu’on sache que demain il y a d’autres qui veulent être candidats. Cela est tout à fait légitime. Il faut que tout le monde comprenne que ce n’est pas seulement le champ des demi-frères et sœurs, c’est une chose commune. Il faut qu’ensemble qu’on en parle et qu’on voit ce qui est le meilleur (…). Pour que tout le monde puisse tirer profit des efforts fournis, pour ne pas que tous nos efforts consentis soient noyés. C’est ce qu’on doit voir, ce n’est pas le favoritisme ». Il utilise ainsi un terme qui est depuis toujours l’injure de base du RPG envers l’UFDG. Le mot est violent. N’oublions pas que ce dernier a toujours été utilisé par les l’opposants de l’UFDG.

Quel est le dénominateur commun à ces mouvements de fond qui paraissent emporter la politique nationale vers un nouvel horizon ?

Les soubresauts idéologiques de nos leaders politiques ne semblent pas avoir d’autre motivation que la quête de la posture, du paraître, de l’image. Les basculements du discours sont trop soudains, trop spectaculaires pour être crédibles. Ils ne peuvent pas s’expliquer autrement que par l’obsession du reflet du pouvoir et de l’argent. La mode en faveur de «l’unité nationale» n’est pas non plus dépourvue d’ambiguïté. Avant l’élection présidentielle, le RPG-Arc-en-ciel fustigeait «le bloc réactionnaire composé de l’UFDG, de l’UFR et d’autres partis satellites de l’opposition républicaine». Le scrutin d’octobre 2015 a été marqué par les pires injures, touchant notamment à l’accusation d’ethnocentrisme. Et puis soudain, dans un bel esprit de table rase, devrait s’imposer l’effacement des clivages au profit d’un nouveau souffle unitaire.

Hélas, le mythe de la recomposition politique n’est rien d’autre que le masque d’une nouvelle vague d’un flux connu d’hypocrisie et de calculs politiciens. L’obsession du palais sèkhoutouréya en 2020 est en ligne de mire de ces grandes manœuvres souterraines. Que recèlent les annonces, coups de menton, retournement de vestes? Rien: l’absence d’idées, de projet, de volonté. La notion de bien commun achève de se désintégrer dans un grand courant de folie mégalomaniaque qui s’est emparée d’une partie de la classe politique nationale. Les questions de fond sur l’avenir de la Guinée, en matière d’industrie, d’emploi, de sécurité, se noient dans les eaux sombres du calcul. Une immense tartufferie s’est développée autour du « dernier mandat » du Professeur Alpha Condé. Présenté comme une dernière chance pour les uns et les autres, il donne lieu à une extraordinaire récupération politicienne. Avec, comme moteur, une seule ambition: être le prochain à pavoiser sous les ors du Palais sekhourouréya. La politique guinéenne a basculé dans une névrose obsessionnelle, celle d’être président. Quid du guinéen ?

L’encre à peine séchée sur la promulgation de sa victoire, le professeur Alpha Condé, qui n’avait pas hésité à accuser ses opposants d’être la cause de l’état calamiteux de la Guinée, entreprenait de les appeler à la rescousse «pour réformer la Guinée en profondeur». C’est une première, inédite en Guinée, qui représente un assez génial contrepied de l’adversaire politique. Elle est un pari de fond et de long terme susceptible d’apporter un renouvellement et un enrichissement considérable de la base politique du RPG-Arc-en-ciel, en coupant une partie de l’herbe sous le pied de l’UFDG. Mais en Afrique, l’expérience nous prouve que jamais ces politiques de débauchage n’ont produit l’effet escompté : elles laissent de marbre les vrais opposants qui refusent « d’aller à la soupe » et déconsidèrent les marginaux de l’opposition qui y voient une opportunité de carrière que leur camp ne leur fournirait pas forcément en cas d’accès au pouvoir. Elles permettent au mieux le recrutement de personnages perçus par leurs alliés d’hier comme des «traîtres» ou des «arrivistes».

Les partisans et les électeurs du professeur Alpha Condé, ont toujours décelé en lui l’homme de la situation pour réaliser enfin ce qu’il fallait faire dans ce pays réputé irréformable, et sortir la Guinée de cette impasse dans laquelle la somme des refus de prendre à temps les décisions qui s’imposent l’enfonçait.Beaucoup ont dû payer leur audace au prix de leur vie, de leur carrière, de leur jeunesse et de leur bien. Avec cette stratégie d’ouverture du Professeur Alpha Condé, ceux-ci se sentent trahis et fragilisés. Je comprends leur déception, mais je ne valide pas leur changement d’opinion.

La lutte n’est pas terminée, ni l’espoir de restaurer la société de paix, de justice et de liberté défendue. Aujourd’hui plus que jamais notre conscience nous interpelle chacun à faire son mea culpa, par-delà nos différences, nos opinions et nos intérêts propres, et par-delà les errements et abstentions coupables du passé. Ni l’histoire, ni nos descendants ne nous pardonneront encore si nous ne faisons rien afin d’éviter à notre pays de retomber à nouveau dans le cycle cynique de violence et de confusion.

Nous avons besoin de personnes intègres qui n’ont pas été impliquées dans des scandales et qui ont démontré ou démontreront leur capacité à gérer des situations compliquées. Les hommes et femmes du gouvernement Alpha Condé II bénéficient d’une image publique positive, chose rare dans un pays qui souffre d’une corruption endémique.

Le professeur Alpha Condé n’a rien promis à personne. Nous avons peut être surestimé sa reconnaissance. Donnons-nous le temps nécessaire pour analyser ses choix, car nous pourrions regretter des phrases dites un peu vite. Comprenez que, partout dans le monde, c’est le chef qui décide. Jeunes du RPG-Arc-en-ciel, pourquoi militerions-nous ?

 

Ousmane Boh Kaba

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