À propos des dépositions et de la torture des accusés, de l’énormité des montants des sommes perçues et du témoignage de Mamadou Kindo Touré. (par EL hadj Sidiki Kobélé )

Kobele Keita
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Kobele KeitaLes commentateurs de mes deux articles publiés par Gbassikolo ont abordé des questions hors sujet, mais qui méritent mises au point allant dans le même sens que sur les ragots du 22 novembre 1970 afin que les lecteurs aient d’autres informations…

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Selon les détracteurs de la Première République, les dépositionsdes accusés étaient rédigées et remises aux accusés pour lecture ; la torture était systématique ; les sommes annoncées étaient colossales.

Il est encore difficile de vérifier toutes ces assertions d’autant plus que si les   promesses contenues dans les communiqués et discours des responsables du coup d’Etat du 3 avril 1984 avaient été tenues avec organisation de procès publics selon les normes occidentales recommandées par nombre de Guinéens à l’époque, les auteurs de ces textes et leurs méthodes de travail auraient été connus, l’authenticité de ces assertion auraient été confirmées ou infirmées avec des preuves.

Malheureusement ceux qui avaient étéaccusés de ces faits avaient été sciemment assassinés par des membres du CMRN qui avaient trop à se reprocher et qui craignaient donc des révélations gênantes.

Mais certains analystes font remarquer que ce qui ne peut – être contesté, c’est que certains des faits relatés dans ces dépositions   n’étaient connus que des seuls accusés et du SDECE, en général.

Aussi, nombre d’observateurs sont-ils d’accord qu’il faut certes prendre les dépositions avec précaution, d’autres, parce que mieux informés, sont unanimes à reconnaître que « les anciens du SDECE admettent cependant que les griefs faits à la France sont en partie fondés et qu’aucun complot n’est imaginaire », conclut, par exemple, M X et Patrick Penot.

Tout en recommandant la même prudence, Roger Faligot et Kop, auteur de La Piscine,citant deux extraits des dépositions de Karim Bangoura et du général Noumandian Keita, affirment que « pour la période 1959-1961, les responsables du SDECE de l’époque admettent que les griefs sont fondés ».

Par ailleurs, un extrait de la déposition d’Alpha Abdoulaye dit Porthos est confirmé 22 après l’agression du 22 novembre 1970, par les hommes qu’il cite danssa déposition.

Alpha Abdoulaye dit Porthos  dépose : « Barry Bassirou fonctionnaire de l’OUA à AddisAbeba nous a informé du passage de Condé Julien qui, non seulement a touché certaines autorités du gouvernement éthiopien dans le but de les voir soutenir l’action de leur réseau, mais, avant son départ, a distribué des brochures subversives contre le régime »[guinéen].

Julien Condé et Abdourahamane, confirment, en 1992, les propos de Pothos en ces termes : « Bassirou Barry, alors conseiller juridiquede l’OUAqui avait transporté Julien Condé dans sa voiture à travers la ville d’ AddisAbaba, perdit son poste ».

A propos de la même déposition de Porthos qu’il venait de lire, le Professeur Jean-Suret Canale, à l’issue du colloque d’avril 1982 au Palais du Peuple à Conakry, m’avait confirmé l’authenticité ou la réalité de certains faits relatés par l’intéressé dont j’ai pris note…

Pour ce qui est de la torture, elle n’aurait été appliquée que quand Ismaël Touré aurait été nommé Président de la commission révolutionnaire d’enquête ;des témoins ajoutent que jusqu’à cette date, les accusés déposaient librement ;-FaraguéTounkara qui a fait deux fois la prison du camp Boiro nous a cité le cas de feu ministre Bangaly Camara interrogé sur son lit de malade à l’hôpital Donka et qui avoua sa participation au complot Petit Touré (1985) sans citer ses complices.

Enfin selon un certain ancien prisonnier du camp Boiro dont le témoignage m’avait été confirmé par Jean-FaraguéTounkara quand il travaillait avec moi à la Bibliothèque Nationale de Conakry, à partir de sa deuxième sortie de prison   « la seule chose que nous faisions exprès ce sont les montants des sommes reçues que nous exagérions à dessein : ils permettaient de discréditer nos aveux et le régime en raison de leur énormité ».

A noter que la diffusion, en juillet l985, par les éditions du Seuil à Paris du livre La Piscine de Roger Faligot et Pascal Kropavait mis fin aux travaux de la commission que le   Comité Militaire de Redressement National (CMRN) avait mise en place au lendemain du désastreux Coup d’Etat du 3 avril 1984 pour démontrer que tous les complots dénoncés sous la première République de Guinée étaient faux. Le journaliste Tayiré Diallo, alors secrétaire général de ladite Commission, après analyse des archives regroupées, affirme, dans son rapport d’activité1987-1988, que certains témoignages des rescapés de la prison du camp Boiro « sont romancés , qui comportent de nombreuses et graves omissions, certainement volontaires, qui escamotent la vérité historique et les documents trouvés prouvent , de manière irréfutable , que certains faits et gestes ne se sont pas passés comme les auteurs de ces témoignages ont essayé de nous les faire croire ».

Prenant trois exemples, il écrit, au vu des documents retrouvés :

– « Jean Paul Alata, auteur de Prison d’Afrique, est plein d’invraisemblances et de contrevérités ».

– « Le livre de M. Ibrahima Baba Kaké, auteur de Sékou Touré, le héros et le tyran,est trèsromancé et s’appuie sur des témoignages pas toujours véridiques ».

– « Le livre de Mgr Raymond-Marie Tchidimbo, intitulé  Le Noviciat d’un Evêque …tait volontairement certains aspects importants du rôle joué par l’ex-archevêque de Conakry auprès de de M. Sékou Touré, prouve une certaine complicité de l’archevêque avec Sékou Touré, M.Siaka Touré et M.Ismaël Touré ».

Le rapport se termine par ce constat: « Ces témoignages sont, à la fois, partiels et partiaux. Leurs auteurs n’ont peut-être jamais pensé que l’on retrouvera un jour des archives originales qui aideraient à rétablir la vérité historique »

Tayiré Diallo regrette également que certains membres de la commission du CMRN (citant nommément l’historien Djibril NianeTamsir) se soient emparés d’importantes archives pour empêcher la manifestation de la vérité.

C’est le cas de Mamadou Kindo Touré. Ses témoignages sont-ils crédibles ?

Ancien commissaire de Police et ancien prisonnier, Mamadou Kindo Touré a consacré un ouvrage au complotKaman – Fodéba sous le titre : Unique survivant du « complot Kaman – Fodéba; comme la plupart des témoignages diffusés sur les complots par d’anciens prisonniers du camp Boiro, ce livre comporte trop de « vérités de Kindo », donc contestables et contestées même par d’anciens prévenus arrêtés dans le même cadre ou par d’ancien collaborateurs de l’auteur. Il en est ainsi de la cause de son arrestation. Pourquoi a-t-il été arrêté et condamné à cinq ans de prison pour divulgation de secrets professionnels ?

Kindo Touré affirme dans son ouvrage de vengeance qu’on lui aurait reproché l’envoi d’une note personnelle  « adressée dix mois plus tôt au capitaine Abou Soumah, alors chef de bataillon de N’Zérékoré » à propos du procès-verbal d’interrogatoire dudit capitaine relatif à « la disparition de masque à Gama (N’Zérékoré) » dont celui-ci se serait rendu coupable.

Cette version a été fermement contestée par un ancien directeur général des services de police en ces termes : « c’est un cas de haute trahison, soutient-il ; Kindo Touré était aux renseignements généraux où il avait extrait des informations reçues sur le complot Kaman-Fodéba, le passage d’un rapport d’enquête consacré au capitaine Abou Soumah qui n’avait pas détruit la lettre que Kindo lui avait envoyée. Et à la suite de la perquisition effectuée au domiciledu capitaine Abou Soumah après son arrestation, la Police a retrouvé ladite correspondance et Kindo Touré avait été arrêté. S’il n’a pas été exécuté, s’il a été un chef de chambrée très écouté dans la prison du camp Boiro, chargé de répartir la nourriture et le matériel destinés aux prisonniers, ce fut grâce au général LansanaDianè, ministre de la Défense nationale et président du Comité Révolutionnaire d’enquête : ils avaient tissé des rapports amicaux très profonds à Kankan où Kindo fut un moment commissaire »..

Ce: témoignage, déjà publié dans Des complots contre la Guinée de Sékou Touré (1958-1984) en 2002, n’a jamais été démenti par l’intéressé. Ce qui atteste que ce dernier n’avait pas dit la vérité sur la raison véritable de son arrestation. Est-il possible que ses autres témoignages soient crédibles ?

                                                                          

EL hadj Sidikikobélé  Keita

                       

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