Etats-Unis: le président Alpha Condé au forum de New York et devant BBC et CNN

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Arrivé samedi 20 septembre 2014 pour participer à la 69e session de l’assemblée générale des Nations Unies, le président Alpha Condé, sollicité ici et là par les investisseurs, les medias et ses pairs, était invité ce dimanche au forum de New York au cours duquel il a fait une brillante intervention. Le lundi 22 septembre 2014 il était devant les micros de BBC et CNN.

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Le président guinéen, le porte-voix des pays touchés par Ebola, en compagnie de son homologue gabonais Aly Bongo et l’ancien president péruvien Alejandro Toledo Manrique au forum de New York a, après avoir dit ce que devrait être l’impact du progrès technologique sur l’économie des pays du continent noir, dénoncé le manque de solidarité des pays africains dans la gestion de la fièvre épidémiologique dit Ebola.

Que ce soit au forum ou devant BBC et CNN les questions maraudaient exclusivement autour de la fièvre Ebola qui ravage actuellement les pays de l’Afrique de l’Ouest dont le bilan s’évalue aujourd’hui à 2811 morts.

Première question : quel peut être l’impact du progrès technologique sur l’économie des pays africains ?

Pour le locataire de Sékoutouréya, si avant il fallait faire passer les câbles sous la mer pour assurer la connexion téléphonique entre les localités, aujourd’hui grâce au Global système for mobile communications (GSM) le village le plus reculé peut avoir le téléphone. Aussi comme nous n’avons pas le développement des usines, dans le même secteur, nous pouvons aller à la technologie la plus avancée. Mais cela suppose d’abord, une bonne gouvernance, le respect des libertés démocratiques et surtout la maitrise de nos ressources.

L’Afrique est confrontée à trois grands problèmes:

Il y a le manque d’infrastructures industrielles pour la transformation de nos ressources sur place.
 

L’Afrique est le continent qui a le plus de matières premières, elle est très riche et dispose de grandes possibilités agricoles et énergétiques. Ce qu’il faut, c’est d’éviter l’erreur de suivre le modèle de développement des pays de l’Asie du sud comme la Chine. Eviter d’être de simple exportateur de matières premières. Assurer au contraire la transformation de celles-ci dans nos pays. Ce qui n’est malheureusement pas le cas pour le moment. Bien évidemment, plus on transforme sur place, plus on a de plus-value.

Le problème d’éducation de la jeunesse

Assurer l’éducation de la jeunesse africaine qui constitue les 3/4 de la population Africaine. Autrement dit, plus de 75% des Africains ont moins de 30 ans, ce qui fait dire que l’éducation est fondamentale.

Pour que les nouvelles technologies puissent permettre à l’Afrique de faire l’accélération de l’histoire de son développement, il faut que sa jeunesse bénéficie d’une bonne éducation pour maitriser ces technologies.

Enfin le manque d’un véritable système de santé

Nous n’avons pas un système sanitaire performant, c’est ce qui fait que nous avons toujours des épidémies, a poursuivi le numéro un guinéen.

En conclusion, les trois secteurs les plus importants aujourd’hui qui permettent la maitrise des nouvelles technologies, sont l’acquisition d’un meilleur système de santé, l’éducation de la jeunesse et le contrôle de nos matières premières par la construction des usines de transformation.

Les nouvelles technologies ne détruisent pas les emplois en Afrique, elles créent de l’emploi et augmentent le niveau de vie au contraire.

Il ne sert à rien de parler de taux de croissance de 5 à 6% si concrètement ça ne change pas l’assiette de la ménagère. Ce qui est important, c’est comment changer les conditions de vie des populations les plus pauvres en Afrique.

Avec les nouvelles technologies nous pouvons avoir une accélération du développement qui nous permettra de faire face à nos différents problèmes. Mais cela suppose que nous changeons notre façon d’agir et que nous évitons les erreurs des pays développés.
 

Notre développement doit se faire en protégeant l’environnement et sans mettre le climat en cause. Nous ne devons pas copier ce que les pays développés ont fait, mais plutôt tirer les leçons des erreurs qu’ils ont commises. Il faut qu’on comprenne très bien le cycle de développement des pays avancés, analyser leurs erreurs pour les éviter tout en utilisant tous les progrès technologiques qu’ils ont faits. A-t-il commenté, le chef de l’Etat guinéen.

Deuxième question adressée au président Condé : la Guinée est le premier pays qui a été touché par cette épidémie d’Ebola. On entend tout et de n’importe quoi dans les media. Sachant que le président Obama va présider une importante session jeudi 25 septembre 2014 aux Nations Unies aux cotés de vous et aux cotés de bon nombre de chefs d’Etat africains sur la situation d’Ebola. Quelle est exactement aujourd’hui la situation d’Ebola dans votre pays et dans les pays voisins et qu’en est-il exactement de son impact sur le climat des affaires ?

En effet, Ebola est une maladie très grave. Mais ce n’est ni une fatalité, encore moins une maladie incurable. Aujourd’hui il y a une psychose généralisée par le fait que tout le monde pense que la contamination était possible par l’air. Concrètement, comment attrape-t-on le virus Ebola ? S’interroge le président Alpha Condé.

Pour que quelqu’un soit contaminé il faut qu’il soit en contact avec un malade en phase terminale. La fièvre Ebola ne se transmet que soit par le sang, par la sueur ou par la salive. Mieux, on peut être guéri d’Ebola.

Au début, il y a eu des mauvaises communications. Certains medias faisaient croire à la population qu’on ne peut jamais être guéri d’Ebola. C’est ce qui fait que nous avons un grand problème de communication pour convaincre les malades. Si on ne dit pas à un malade qu’il peut guérir est-ce qu’il ira à l’hôpital ?

Il y a eu aussi la panique généralisée causée par les commentaires des medias. Or la tuberculose et le paludisme tuent plus qu’Ebola.

La situation s’est aggravée en Guinée parce que nous n’avons pas su très tôt que c’était Ebola par manque de laboratoires pour nous permettre de détecter le virus. C’est pourquoi, nous avons pris un peu de retard avant de le savoir. Mais dès que nous l’avons su, toutes les dispositions ont été prises pour tenter de freiner la contamination et de l’éradiquer. Par exemple aux aéroports, personne ne peut monter à bord d’un avion s’il a plus de 37 degré Celsius de température. Mieux, la prise de température se fait quatre fois. Et la température de chaque passager était marquée sur son ticket d’embarquement avec le personnel d’Air France. Donc personne n’est partie de la Guinée pour transmettre le virus Ebola dehors. Nous avons un vol d’Air France par semaine il n’y a pas d’Ebola en France, au Maroc ou en Belgique. Le Mali est un pays frontalier, tout le monde passe il n’y a pas de cas d’Ebola.

Ce qu’il faut désormais, c’est de convaincre les populations qu’il y a vraiment Ebola. Parce qu’il y a toujours des gens qui ne croient pas. Ce sentiment est renforcé par les habitudes. Les uns disent que c’est une malédiction, et pour les autres, les mal intentionnés, l’Ebola n’existe pas. C’est une invention du Gouvernement.

Notre problème aujourd’hui en tant que président de la république, c’est comment sensibiliser les populations pour que celui qui a été en contact avec un malade d’Ebola se précipite pour aller à l’hôpital. Car pour qu’un cas suspect soit confirmé, il faut que sa température soit suivie pendant 21 jours. Autrement dit, plus tôt un malade se rend à l’hôpital, plus vite il a de la chance d’être guéri. Pour cela il faut une sensibilisation forte.

Il faut également doter nos pays de médecins. Car c’est le déficit de médecins spécialisés dans le traitement des épidémies et de laboratoires fixes et mobiles qui a accru le nombre de contaminés.

Enfin, il faut trouver les moyens de renforcer notre système sanitaire afin qu’on ne puisse plus être victimes des épidémies pour casser notre élan de développement.

Aujourd’hui, les hommes d’Affaires ont peur. Puisque les medias comme France24, CNN ou BBC ont fait croire que dès qu’on arrive dans l’un de ces trois pays touchés par le virus on attrape tout de suite le virus. Or, actuellement à Conakry, les écoles française et libanaise ont ouvert leurs portes. Malgré toute la propagande négative sur Ebola, l’école guinéenne était ouverte jusqu’en juillet 2014. Les examens de fin d’année se sont très bien passés. Aucune contamination n’a été signalée dans les écoles. Si le gouvernement a retardé l’ouverture des classes, c’est parce qu’il veut doter tous les établissements scolaires des moyens de protection pour éviter les contaminations. C’est vrai qu’Ebola est une maladie grave qui fait peur. Mais est-ce que cela donne le droit aux pays africains de fermer leurs frontières et aéroports aux pays touchés par Ebola ?

L’attitude du Maroc dans la gestion de cette épidémie est un exemple à suivre. Non seulement le Maroc n’a pas arrêté ses vols en Guinée, mais aussi, toutes les coopérations continuent. Mieux, nous venons de tenir un forum économique au Maroc qui a regroupé 200 hommes d’affaires guinéens et 800 marocains. Mais personne n’a entendu parler d’Ebola au Maroc. C’est pourquoi nous rendons un grand hommage aux autorités marocaines. Comme quoi, c’est dans les difficultés qu’on reconnait les vrais amis.

Les investisseurs doivent comprendre que le virus n’est pas transmis en air. Qu’ils ne refusent pas de venir en Guinée par peur d’attraper le virus Ebola. Bien sûr, la communauté internationale ne s’est pas mobilisée tôt, mais nous sommes très heureux aujourd’hui que le président Obama ait pris une mesure très importante avec le Secrétaire Général des Nations Unies, Ban Ki Moon.

En fin nous sommes certains qu’on peut vaincre Ebola si tout le monde s’y met et particulièrement les entreprises privées. Car si elles continuent d’avoir peur cela va avoir des conséquences très graves sur notre économie.

Malheureusement pour nous Ebola est arrivé à un moment où l’économie guinéenne démarrait sérieusement. Nous venons de signer des conventions minières avec Rio Tinto pour 20 milliards de dollars d’investissement, avec Mobadala pour 5 milliards de dollars d’investissement, etc. Le Medef aussi est venu à Conakry et reparti enthousiaste.

Ce qu’il faut retenir, a conclu l’actuel homme fort du pays d’Ahmed Sékou Touré, c’est que toutes les mesures ont été prises contre ce fléau, mais malheureusement, le Liberia et la Sierra Leone ont un système sanitaire moins performant. Moi, entant que président en exercice de la Manoriver, mon rôle est de me battre pour la Guinée, la Sierra Leone et le Liberia. Parce que si la situation de la Guinée est moins grave, elle va s’aggraver à cause des malades du Liberia qui traversent les frontières par manque de lits et d’hôpitaux. Par exemple au mois de juin dernier, nous étions presque arrivés à la fin du traitement, quand des nouveaux malades en provenance du Liberia ont traversé les frontières pour rentrer en Guinée. C’est pourquoi, il faut que le monde entier comprenne que la gestion de l’épidémie doit être régionale et non au cas par cas.

La dernière question : qu’est-ce que le secteur privé peut faire aujourd’hui pour aider vos différents pays touchés par le virus ?

Nous aider à avoir les kits de protection, à renforcer notre système sanitaire et à nous procurer des dispensaires et des laboratoires. Aussi faut-il que les investisseurs n’aient pas peur de venir investir.

Enfin il faut que nous les africains soyons capables d’accélérer le développement après Ebola et acceptons d’être plus responsables et plus solidaires. Ce qui n’est malheureusement pas le cas pour le moment.
 

 

Une correspondance spéciale de Bangaly Condé « Malbanga »

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