« La politique suicidaire d’Alpha Conde expose la communauté malinké face au ras le bol des autres communautés nationales », selon BAH Oury

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GBK C’est un BAH Oury visiblement en colère qui est monté au créneau pour dénoncer « la politique agressive et irresponsable » du régime du President Alpha Condé, ainsi sa gestion évènements dans le sud-est de la Guinée. Lisez plutôt cette déclaration qui vient de parvenir à notre rédaction !

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LE SPECTRE DE LA GUERRE CIVILE MENACE LA GUINEE : IL EST URGENT D'AGIR !

Mon cœur saigne de tristesse suite aux nouvelles tragiques qui proviennent de la

Guinée-Forestière au sud du pays. Depuis le début de la semaine, une jacquerie oppose  deux communautés de la région, les Koniankés et les Guerzés. De sources bien informées, le nombre des victimes est hallucinant mais le sens de responsabilité nous commande de ne pas le communiquer pour ne pas accentuer le désarroi et la terreur qui se sont emparés des populations sudistes. Il est urgent qu'une commission d'enquête internationale sous l'égide des Nations Unies soit constituée pour faire toute la lumière sur cette nouvelle tragédie en Guinée.

Comment une exécution extrajudiciaire d'un présumé délinquant issu de la communauté Konianké peut elle embraser toute la région comme une traînée de poudre semant la mort et la désolation aussi bien dans les villes comme Nzérékoré, Koulé, Yomou, que dans les zones rurales? En vérité, de manière récurrente des conflits meurtriers ensanglantent  Nzérékoré et ses environs. En mai 2011, un simple fait divers transforme Gallapaye en terre d'affrontement entre Konianké et Guerzé. La Cour d’assises de Kankan qui avait siégé pour juger cette affaire condamne sévèrement les prévenus guerzé avec plusieurs sentences de mort. Cette  partialité flagrante de l'instance judiciaire a été douloureusement ressentie par les populations autochtones de la région comme un mépris à leurs égards. En août 2012, les villageois de Zogota sont attaqués en pleine nuit par les forces de sécurité guinéennes. Les images du macabre massacres de six  paysans dont le chef de village et le doyen de la contrée avaient fait le tour du monde. Là aussi, leur crime avait été seulement de réclamer bruyamment des postes de manœuvres pour leurs enfants  dans la mine de fer Valé-BSGR de Zogota.

La logique répressive et meurtrière a toujours été privilégiée par les autorités guinéennes face à des revendications légitimes d'une part et une attitude partiale face aux contradictions intercommunautaires d'autre part, a fini par ruiner toute crédibilité des représentants de l'Etat guinéen, y compris les autorités gouvernementales. Le  ressentiment des Guerzés et des Tomas est nourri par l'expérience collective de l'injustice et de leur relégation comme des sous-citoyens sanctionnant une présupposée "infériorité".

Cette situation délétère a été aussi encouragée par l'exacerbation des contradictions ethniques sous-jacentes entre les populations de la Guinée Forestière par les autorités de Conakry depuis le début des années 1990, exploitant ainsi les prolongements de la guerre civile libérienne en Guinée. Il est notoirement reconnu que l'Ulimo fraction d'obédience konianké partie prenante de la course au pouvoir à Monrovia a été constituée, entrainée, financée et instrumentalisée par Conakry. Depuis lors, cette "armée de l'ombre" est devenue une milice armée que les autorités de Conakry du Général Lansana Conté en passant par le CNDD et jusqu'à Alpha Condé ont utilisée pour réprimer toutes les revendications populaires en Guinée. Si auparavant, cette guerre secrète était masquée, aujourd'hui par contre son instrumentalisation est institutionnalisée par la gouvernance sécuritaire d'Alpha Condé. C'est pour cela que l'année dernière malgré l'interdit du préfet de Nzérékoré limogé depuis lors, plus d'un millier de "donzos armés de fusils de chasse" paradent pendant des semaines à Nzérékoré. Cette démonstration de forces n'avait pour but que d'intimider et terroriser aussi bien les guerzés que les tomas de la région.

Cette politique agressive et irresponsable se décline aussi dans la capitale Conakry que dans la région du Fouta Djalon. La milice armée qu'entretient Alpha Condé dans la capitale est incorporée clandestinement dans les rangs des forces de défense et de sécurité nationales. C'est celle-ci qui réprime sauvagement les manifestations pacifiques de l'opposition. Au Fouta -Djalon , il a officialisé l'existence d'une coordination régionale fantoche "la Coordination de la Moyenne-Guinée" qui promeut l'appartenance au mandingue-djalon de la population foutanienne ayant des noms de famille à consonance "mandingue". Là aussi, la division est entretenue et exacerbée pour pousser les familles les unes contre les autres alors qu'il s'agit bel et bien de la même communauté ethnique et culturelle. Afin de justifier la présence de la milice privée dans cette région du massif montagneux, les donzos sont officiellement convertis en gardes forestiers et doivent également "lutter contre le vol de bétail". Ce plan machiavélique n'a pour but que de faire rentrer le loup dans la bergerie.

Le voyage de M. Alpha Condé pour Abuja alors que son pays s’entre-déchire illustre éloquemment le mépris qu'il nourrit à l'égard des souffrances des communautés guinéennes. Son indifférence met davantage en lumière la mal-gouvernance endémique du pays et le recours systématique à de violentes répressions qu'il affectionne. Une gouvernance autiste et ethnocentriste est entrain, de par ses carences d’entraîner toute la Guinée dans la persistance d'un conflit meurtrier qui de nature  communautaire peut se prolonger rapidement en conflit confessionnel ravageur du type « Libérien ».  En fait, M.Alpha Condé déroule un programme d'occupation militarisée  de la Guinée par une milice privée qui lui est totalement dévouée. Aura t-il le temps de parachever ce plan dont les effets commencent à se faire voir? Seul l'avenir nous le dira.

 

Sa politique suicidaire a son revers, car à terme elle expose la communauté malinké  face au ras le bol des autres communautés nationales. C'est ainsi que le 8 décembre dernier, Guéckédou à la lisière entre les régions de la savane et de la forêt, s'est retrouvé en flamme du fait d'une opposition entre populations Kissi et malinké. Plusieurs cas de décès furent dénombrés. Ceci est une alerte sérieuse que les élites de la communauté mandingue doivent prendre en considération. Leur passivité face à la dangerosité de la gouvernance actuelle peut être interprétée comme une complicité active d'autant plus que la coordination mandingue, entre les deux tours de l'élection présidentielle de 2010 avait menacé  "de diviser la Guinée, si leur fils n'était pas choisi". Cette déclaration avait été accueillie par une attitude couarde par l'ensemble de la classe politique nationale et par les autorités de la transition de l'époque. Aussi, il est grand temps que les véritables sages mandingues et leurs  élites éclairées se démarquent radicalement des choix dangereux d'Alpha Condé.

La tragédie qui se déroule actuellement en Guinée, me fait penser à la guerre civile d'Espagne dans les années 1930. A l'époque, quelques rares esprits en Europe avaient compris que la  seconde guerre mondiale avait déjà commencé dans la péninsule Ibérique.

Je souhaite ardemment que le spectre de la guerre civile épargne mon beau pays. Mais ceci ne sera qu'un vœu pieux si la gouvernance d'Alpha Condé continue. Son départ du pouvoir est devenu plus que jamais une nécessité pour sauver la Guinée et la sous-région. Mon inquiétude est encore renforcée par le fait que "les accords politiques issus du dialogue inter-guinéen" tétanisent la classe politique guinéenne alors qu' inexorablement une dynamique déstabilisatrice du pays se déroule sous leurs yeux comme un cancer qui s'empare des institutions étatiques et de la société toute entière. Hypnotisée par une hypothétique élection législative l'opposition démocratique ne voit pas que l'urgence actuelle n'est autre que de sauver la Guinée et les guinéens d'un complet désastre. La dramatique situation qui prévaut dans la région de Nzérékoré interpelle aussi bien les citoyens guinéens que la communauté internationale. Ne rien faire, c'est le risque de voir la Guinée sombrer dans une guerre civile.

 

Si la Guinée brûle, nous en  serons tous comptables. Il est impératif d'agir pendant qu'il est encore possible d'arrêter les massacres et de situer les véritables responsabilités.

 

le 18 juillet 2013

 

BAH Oury

Ancien Ministre de la Réconciliation Nationale

1er Vice-Président de l'UFDG 

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