Communiqué du porte-parole du Front pour la Justice et le Développement (FJD)

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GBK Lettre ouverte au gouvernement guinéen, à l’Assemblée Nationale,  aux organisations de  la société civile, aux partis politiques guinéens et à la communauté internationale.

 

Objet : le projet de recensement sectaire d’Alpha Condé de mars 2014.

 

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Le 21 février 2010, l’opposant Alpha Condé, qui estime que l’électorat de la diaspora n’est pas favorable à son parti, avait préconisé l’exclusion des Guinéens de l’extérieur à l’élection présidentielle.

 

C’est par le combat de Monsieur Bah Oury, à l’époque Président de la commission politique des Forces Vives, que la réunion plénière de ces dernières du 23 février 2010 en présence de la CENI, reconnaitra le droit d’être recensés et celui de voter des Guinéens de l’extérieur, consacrés par la Constitution de notre pays. C’est le cas pour tous les pays se réclamant être des Etats de droit. 

 

Le 06 février 2012, lorsqu’une journaliste de France 24 interpella le Président Alpha Condé sur sa politique de marginalisation de toute une communauté guinéenne, « l’ethnie peule majoritaire du pays » dont est issu son principal adversaire politique, Alpha Condé nia le fait que l’ethnie peule est majoritaire en Guinée, fait constaté par l’administration coloniale et tous les régimes qui se sont succédé dans ce pays (*). Il promit à la journaliste d’apporter de nouvelles statistiques prouvant le contraire.  

 

Ces déclarations lourdes de conséquences et ce genre de projets qui furent à la base de la guerre civile dans d’autres pays, n’ont provoqué aucune émotion au sein de la classe politique guinéenne et, par conséquent, ni dans l’opinion internationale. Il s’en suivra un retard considérable à dessein des législatives et un recensement discriminatoire spécial en lieu et place de la révision du fichier électoral prévu par la Constitution pour permettre au RPG de « gagner » la majorité aux élections parlementaires de 2013.  

 

Dans une émission de RFI du mardi 23 avril 2013, on apprend que ce recensement illégal orchestré par le pouvoir a donné le résultat suivant : 

 

Depuis l’élection présidentielle de novembre 2010,

 

• Il n’y a eu que 2 500 nouveaux électeurs dans la plus grande circonscription électorale de Conakry.

• Il n’y a eu que 11 000 nouveaux électeurs dans tout le Fouta

• Quelques 86 000 nouveaux électeurs en Guinée Forestière dont le RPG revendique partiellement comme son fief.

• Et 400 000 nouveaux électeurs en Haute Guinée, fief du RPG, parti d’Alpha Condé.

 

Ces recensements ethniques ont été explicitement dénoncés par les observateurs étrangers et reconnus par le pouvoir lui-même qui accepta de procéder à un recensement supplémentaire de correction pour que l’opposition accepte de participer aux législatives 2013. Ce fut une promesse signée dans les accords du 3 juillet 2013 et qui n’a pas été respectée par le pouvoir, malgré la mise en place d’un comité de veille. Cependant, l’opposition ira aux élections sans les corrections nécessaires et légitimera les résultats frauduleux qui ont donné la majorité parlementaire au parti d’Alpha Condé.

 

Le point 8 des accords de sortie de crise du 03 juillet 2013 a limité les actions de l'opérateur technique Waymark/Sabari à la confection du fichier électoral et à la production des documents électoraux pour les législatives 2013. Celui du point 9 a prévu la sélection, dans la transparence et le respect de la procédure, avec l’aide des partenaires étrangers membres du comité de veille, d'un nouvel opérateur technique qui aura la charge de préparer l’organisation de l'élection présidentielle de 2015. C’est donc avec l’aide de cet opérateur neutre que le recensement qui sert de base pour le nouveau fichier électoral doit être effectué.

 

La décision précipitée d’organiser le recensement, avant le choix du nouvel opérateur, est motivée par le fait que le pouvoir veut utiliser Sabari Technologie et les appareils de Waymark configurés pour frauder.

 

Tant que le nouvel opérateur n’est pas choisi conformément aux accords du 03 juillet 2013, nous ne devons accepter aucun recensement. Les acteurs politiques doivent comprendre que c’est maintenant que commence le processus de l’élection présidentielle de 2015 et agir en conséquence.

 

Après avoir atteint son objectif frauduleux des législatives, annoncé en 2011, Alpha Condé qui a unilatéralement dissout le Comité de suivi des accords du 03 juillet 2013, définit la mission de son nouveau gouvernement de 2014 : préparer sa « victoire » à la présidentielle de 2015. C’est dans ce cadre qu’Alpha Condé a signé le décret ordonnant le recensement général de la population et de l'habitation en Guinée du 1er au 21 mars prochain excluant des millions de Guinéens de l’étranger. Ce qui fait 14 jours ouvrables seulement pour un si grand et important projet national, quand on y soustrait les 6 jours de weekend contenus dans l’intervalle donné. Non seulement cette durée est insuffisante pour un recensement sérieux des Guinéens de l’intérieur, mais aussi la volonté de continuer avec l’opérateur Sabari/Waymark et d’exclure les Guinéens de la diaspora est une violation des accords du 3 juillet 2013 et une violation grave du droit constitutionnel des Guinéens de l’extérieur. Ce qui ne devrait pas laisser la classe politique guinéenne, y compris nos compatriotes membres du RPG, indifférente.

 

C’est cette indifférence de la classe politique face aux projets d’un homme dont la dangerosité est connue de tous et la misère artificielle imposée à mon peuple qui est aujourd’hui le plus souffrant de toute la sous-région qui ont motivé mon engagement en politique. En effet, le droit de vote de tout citoyen guinéen, où qu’il se trouve dans le monde, est consacré par l’article 22 de notre Constitution qui stipule que :

 

« Chaque citoyen guinéen a le devoir de se conformer à la Constitution, aux lois et aux règlements. Chaque citoyen a le devoir de participer aux élections, de promouvoir la tolérance, les valeurs de la démocratie, d'être loyal envers la Nation ».

 

Le recensement général de la population guinéenne ne saurait être réduit à des manœuvres électoralistes. Au-delà du droit de vote, il fonde la base de la citoyenneté guinéenne qui est un droit naturel et non-négociable de toute guinéenne et de tout guinéen.

 

Dans un véritable Etat démocratique ou de droit, l’appartenance à une ethnie ne peut pas être un avantage ou une défaveur.

 

Par ailleurs, aucune nation ne peut se développer sur des bases de statistiques mensongères et fabriquées à dessein. La crise qui continue de secouer la Grèce plusieurs années après sa rentrée dans la zone euro devrait être un enseignement pour tout Etat de ce monde.

 

Nous devons empêcher Alpha Condé et son parti RPG de compromettre l’avenir de la Guinée.

 

En effet, quand on sait que le régime condé attend ce recensement pour délivrer les nouveaux passeports et cartes d’identités guinéens, on comprend aisément que c’est le scénario qui a conduit à la guerre civile en Côte d’Ivoire qu’il est en train de rééditer en Guinée. Les préparatifs des législatives 2013 et des témoignages des membres de son gouvernement attestent cela. A titre d’exemple, la Ministre chargée des Guinéens de l’étranger à l’époque révélera en décembre 2013 que malgré ses multiples tentatives et l’offre faite par des partenaires étrangers pour le financement et l’assistance technique, le Président Alpha Condé n’a jamais accepté d’inclure les Guinéens de l’étranger dans le projet de recensement de la population guinéenne.

 

Ce n’est pas par manque de patriotisme ni par le gout de l’aventure que des millions de Guinéens se sont retrouvés en dehors de leur pays. Ce phénomène a ses causes dans la nature et les actions des différents régimes qui se sont succédés en Guinée, en particulier, le régime révolutionnaire sanguinaire de Sékou Touré.

 

Le gouverneur colonial français Roland Pré, se fondant sur des faits scientifiquement prouvés et des études minutieusement faites sur les ressources matérielles et humaines des colonies françaises, a noté dans son ouvrage en 1951 (*) que la Guinée a les meilleurs atouts pour jouer un rôle de premier plan dans le développement économique et industriel de l’empire français. Après un demi-siècle d’évolution, la Guinée devrait donc être comptée parmi les Etats industriels et développés du monde. Par la faute de nos dirigeants et différents régimes qui se sont succédés au pouvoir, notre pays se retrouve aujourd’hui le moins développé dans la sous-région. La Guinée est aujourd’hui en retard par rapport à son état d’évolution de 1951!

 

Dans son édition du 23/12/2008, Jeune Afrique attirait l’attention sur l’importance que peut avoir les Guinéens de la diaspora pour le développement de leur pays :

 

« S’IL EST UN "BIENFAIT", involontaire, de l’ère Sékou Touré, c’est la quantité relativement importante d’hommes et de femmes de qualité qui compose cette diaspora. Les jeunes Guinéens partis en exil pour fuir l’enseignement à la soviétique de l’époque se sont formés dans les meilleures universités d’Afrique, d’Europe et d’Amérique. Conscients de n’avoir plus de pays, ils se devaient d’être les meilleurs pour se faire une place dans leurs pays d’accueil. Peu d’États africains peuvent aligner autant de cadres bien formés que la Guinée. Encore faut-il que ce pays veuille de ces cadres expatriés, et crée, enfin, les conditions pour les inciter à rentrer, comme le font abondamment aujourd’hui… les Ghanéens! »

 

Tous les régimes du tiers-monde qui ont voulu faire développer leur pays se sont appuyés sur leur diaspora. C’est donc étonnant qu’un soi-disant Professeur, lui-même issu de la diaspora et de surcroit d’origine non-guinéenne, cherche à exclure les millions de Guinéens de la diaspora au lieu de chercher à les intégrer et à faire profiter à notre pays leur expérience et savoir-faire.  

 

Je lance un appel pressant à la classe politique guinéenne, à la société civile, aux représentants du peuple dans le Parlement, et aux partenaires européens de ramener Alpha Condé à la raison ou l’obliger à renoncer à son projet dangereux que des millions de Guinéens ne sauraient accepter.  

 

Allemagne, le 31 janvier 2014 

 

Sadio Barry,

Porte-parole du Front pour la Justice et le Développement (FJD) 

 

(*) – Roland Pré : L’avenir de la Guinée française, Les éditions guinéennes, 1951.

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