
A Mamou tout le monde manifeste, même les abeilles. Lors de la ‘‘grande’’ démonstration d’affection populaire en faveur du CNRD, un invité surprise a légèrement troublé la fête à Mamou : un essaim d’abeilles a décidé de manifester lui aussi… mais pas vraiment du même bord. Selon nos experts en entomologie improvisée -la police locale-, les abeilles n’étaient pas là par esprit révolutionnaire, mais simplement parce qu’elles avaient été dérangées par l’odeur des parfums des manifestants et par la chaleur. En clair, les grandes marques de parfum de nos nouveaux riches n’ont pas seulement attiré les regards, mais aussi toute la faune du coin. L’enquête a révélé que les courageuses ouvrières squattaient tranquillement dans les tuyaux des véhicules des pompiers avant d’être brutalement sorties de leur sieste. Circulez, il n’y aurait donc aucun Niamakala dans l’affaire, jure la police la main sur le cœur.
Mais évidemment, chez les détracteurs du CNRD, on n’est pas dupe. Ils préfèrent y voir un coup mystique : selon eux, ces abeilles seraient téléguidées par ondes spirituelles secrètes pour saboter la manifestation. ‘‘Tactique ancestrale connue’’, affirme un aigri tenace, entre deux incantations sur Facebook.
Quoi qu’il en soit, abeilles naturelles ou abeilles magiques, tout le monde est au moins d’accord sur un point : il y a bien eu des abeilles. Un fait qui, pour Mamou, commence à ressembler à une tradition.
Souvenez-vous de Moussa Philan Traoré, ancien préfet mythique de Mamou sous le Général Lansana Conté. À l’époque, il avait fièrement revendiqué avoir refusé de ‘‘prêter les abeilles de sa mère’’ pour disperser une manif. L’Afrique a des talents, non ?
D’ailleurs, dans une interview d’anthologie accordée au journal Le Populaire en 2014, le même Philan ne cache pas qu’il a, lui-même, lancé une offensive apicole contre des manifestants. ‘‘Ces abeilles sont des guerriers surnaturels de ma mère’’, a-t-il avoué, l’air de dire que Mamou, c’est un peu Wakanda, mais avec des ruches.
Moralité : à Mamou, on ne disperse pas une foule avec des gaz lacrymogènes, de l’eau chaude. On l’effraie avec la cavalerie légère… et bourdonnante.
Ibrahima S. Traoré, guinee7.com