Où va l’UFR ? ( par Haroun GANDHI )

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Évaluation de l'article

On a tous critiqué l'UFDG parce qu'elle faisait certaines déclarations non suivies d'effets, ou pire elle ne faisait rien. Par conséquent l'opposition dans son ensemble, a souvent été assimilée à l'UFDG, et l'UFR a toujours agi en « passager clandestin », en profitant indirectement des critiques adressées qu'à l'UFDG. Ne rien faire ou ne rien dire lui octroyait une relative virginité. Pourtant par le passé, l'UFDG recherchant l'unité de l'opposition, a plus d'une fois avalé des couleuvres, en entérinant pour le compte de l'opposition, des décisions prises par d'autres, et notamment l'UFR.

Cette fois l'UFR se découvre…

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sans doute par volonté de se différencier de l'UFDG ou pour montrer qu'elle en est indépendante. Malheureusement, elle a mal choisi son exemple, à l'occasion du vote du projet de loi de finances 2015, en témoigne sa déclaration justifiant son abstention. En effet et bizarrement, alors que l'Alliance Républicaine a largement critiqué ce budget, elle s'est abstenue par esprit de responsabilité, dit-elle (sic).

 

La loi de finances 2015 et la fin de session budgétaire

 

La loi de finances initiale 2015 comprend :

·         des prévisions de recettes1 de 10 869 915 089 000 GNF (environ 1,265 milliard d'€).

·         des dépenses2 de à 15 068 142 212 000 GNF (environ 1,755 milliard d'€).

·         un déficit budgétaire abyssal (un tiers du budget, du jamais vu !!!) de 4 198 227 123 000 GNF (environ 490 millions d'€), qui sera comblé (sic) par d'autres financements à rechercher par le Ministre de l'économie et des finances.

 

La session budgétaire s'est par ailleurs terminée sans que les députés ne parviennent à avoir des éclaircissements sur leur propre budget (on se demande comment est-ce possible), et sans pouvoir mettre en place un nouveau règlement intérieur (ce n'est pas faute de leur avoir indiqué).

 

Les critiques de l'UFR

On rappelle qu'il existe 3 groupes parlementaires à l'Assemblée Nationale, le groupe « RPG Arc-en-Ciel », le groupe des « Libéraux Démocrates » (composé essentiellement de l'UFDG) et le groupe « Alliance Républicaine », qui comprend l'UFR (10 députés) et les 2 députés du RDIG (Jean-Marc Telliano) et du PGRP (Ibrahima Sila Bah). À l'issue du vote du projet de loi de finances 2015, ce dernier groupe a justifié son abstention, malgré les reproches suivants.

 

Des violations de la loi

 

Le groupe « Alliance Républicaine » observe que le gouvernement a violé :

·         l'article 15 de la LOLF3, en ne déposant pas le document de cadrage budgétaire (autrement dit le budget prévisionnel sur 3 ans) avant le 1er Juillet 2014, ce qui n'a pas permis aux députés de se préparer à en discuter les tenants et aboutissants.

·         l'article 49 alinéa 10 de la LOLF, qui oblige en cas de survenance d'événement catastrophique telle que la fièvre ébola, de faire la transparence des dons et subventions en provenance de l'étranger.

·         l'article 46 de la Constitution, qui exige une loi organique pour fixer les emplois civils que le PRG nomme, ce qui permettrait d'indiquer les nominations qui relèvent du PM (article 58) et des ministres.

·         l'article 50 de la Constitution, qui stipule que le PRG prononce une fois par an devant l'Assemblée Nationale un message sur l'état de la nation.

·         l'article 160 de la Constitution, qui exige que les institutions républicaines (Cour des Comptes, Institution Nationale Indépendante des Droits Humains, Cour constitutionnelle, …) soient mises en place plus tard 6 mois après l'installation de l'Assemblée Nationale.

 

Des prévisions fantaisistes

Le groupe « Alliance Républicaine » a fait des commentaires clairs sur le budget, tout en considérant que certaines recettes sont virtuelles (celles de l'ARPT, du Patrimoine bâti et les recettes minières par exemple). Le groupe a appelé à voter un budget 2015, qui tienne compte concrètement et distinctement des élections communales et présidentielles. En effet, la participation au financement des élections par les partenaires traditionnels tels que l'UE et d'autres bailleurs de fonds multilatéraux ne figurent pas dans le projet de budget 2015.

 

Dans ses propres justifications au refus de voter le projet de loi de finances 2015, l'UFDG a même ajouté la sous-estimation des prévisions de recettes de la CBK, les maigres revenus du secteur de la pêche et la non inscription dans le budget de l'État des recettes issues des ventes des domaines publics le long du littoral de Conakry à Dubréka. De même, la gestion des finances publiques souffre d'un manque de rigueur et de transparence, sinon comment expliquer, que la société Forécariah Mining Company ait exporté 1,3 million tonnes de fer sans aucun paiement de taxes au Trésor public, ou qu'on n'ait retrouvé aucune trace des paiements déclarés par la société Guiter Mining, repreneur de l'ex Aredor ?

 

Le groupe « Alliance Républicaine » considère également que certaines dépenses sont scandaleuses, et notamment l'accroissement injustifié des budgets de la présidence (hausse de 43% par rapport à 2014) et de la primature par exemple, ainsi qu'un budget très insuffisant pour la justice (0,75% du budget) et la santé (3,96% du budget alors que l'OMS et la Cedeao recommandent 15%…et que nous sommes en pleine épidémie ébola).

 

Les demandes particulières du groupe « Alliance Républicaine »

 

Eu égard aux recettes minorées de certains secteurs précités, le groupe « Alliance Républicaine » sollicite par voie de résolution, la mise en place de 2 commissions parlementaires d'information, sur les recettes concernant la téléphonie mobile et le secteur minier.

 

De même, il a également appelé à la mise en place des lois organiques, tels que le Code électoral, et la loi sur la CENI dans un esprit consensuel.

 

Les critiques complémentaires de l'UFDG

 

Un manque de transparence

 

Selon l'UFDG, l'exécution du budget manque de transparence, dans la mesure où les mécanismes destinés à assurer le contrôle et le suivi de l'utilisation des fonds publics sont déficients. À titre d'exemple, il faut citer des contrats de réhabilitation de routes sur la base de marchés de gré à gré et qui montrent des disparités énormes, entre des coûts du km estimés, qui varient entre 4 et 15 milliards de GNF.

 

Dans le domaine de l'électricité, le projet d'adjonction thermique de 100 MW de Conakry avec une entreprise brésilienne pour un montant de 126,405millions de $ avec un coût additionnel de 26 millions de $, et initié depuis le 5 Septembre 2011, n'a jamais vu le jour… mais le gouvernement n'a jamais annulé le contrat !!!

 

Des anomalies

 

Le budget de la sécurité est en baisse de 12% pour représenter 2% du budget, mais si on l'associe au budget de la défense (10,45% du budget), voire d'autres postes (lutte contre la drogue et une partie de la décentralisation attribuée aux préfets militaires), on dépasse le budget de l'éducation pourtant vital (12,99% du budget au lieu des 30% recommandés par les standards régionaux et internationaux), ce qui en dit long sur la priorité de ce gouvernement.

 

Enfin la répartition régionale du budget national de développement dans le secteur des travaux publics, traduit une inégalité de traitement des régions. En effet, la région de Kankan seule reçoit 61% de ce budget, Conakry 20% et les autres régions les 19% restants.

 

Conclusion

Le groupe « Alliance Républicaine » a donc montré par ses remarques fondées, qu'elle était vigilante, mais elle n'en tire aucune conséquence logique et cohérente en s'abstenant (qui ne dit mot consent), car on ne peut accuser ce gouvernement de violations de la loi, et en même temps lui accorder un blanc seing !!!

 

Pourquoi l'UFR s'est-elle abstenue au lieu de refuser le vote de ce projet de loi de finances, comme l'a fait l'UFDG, alors que ce projet sera adopté de toute façon, du fait de la majorité relative du RPG à l’Assemblée Nationale ? Ne pas vouloir sanctionner le gouvernement – en indiquant que l'UFR manifeste son esprit de responsabilité !!! – alors que la loi sera de toute façon votée, constitue un choix politique qu'il va falloir expliquer. En effet, quand bien même la loi de finances aurait été rejetée, cela n'empêcherait nullement le gouvernement de fonctionner (grâce à la règle des douzièmes provisoires ou d'une loi rectificative par exemple).

 

Il est donc temps pour l'UFR de se positionner politiquement. Que l'UFR veuille se différencier de l'UFDG ou montrer qu'elle en est indépendante est une chose, tendre la perche au gouvernement en ne sanctionnant pas ses manœuvres, ou pire ses violations, en est une autre.

 

Si l'UFR et notamment son président, veut séduire les électeurs de l'UFDG, ce n'est pas en montrant une proximité avec le gouvernement qu'elle y parviendra. L'UFR doit indiquer clairement si elle se trouve toujours dans l'opposition, ou si elle se rapproche des faux « centristes », voire du gouvernement, ce qu'elle est parfaitement en droit de faire ?

 

Car avant de se déterminer pour les élections locales et présidentielles, les électeurs ont besoin de savoir à qui ils ont à faire et le plus tôt sera le mieux.

 

Gandhi, citoyen guinéen

« Dans tout État libre, chaque citoyen est une sentinelle de la liberté qui doit crier, au moindre bruit, à la moindre apparence du danger qui la menace ». (Robespierre, Discours sur la liberté de la presse, Mai 1791).

 

 

1Hors budget d'affectation spéciale de riposte contre ébola, que l'Assemblée Nationale souhaite que le gouvernement mette en place pour la gestion transparente des fonds.

2Hors budget d'affectation spéciale de riposte contre ébola.

3Loi organique relative à la loi de finances (LOLF), Loi L/2012/n°012/CNT du 6 Août 2012.

 

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