Alors que la récupération des domaines de l’Etat suscite une vive controverse, maitre Amadou Diallo a fait d’importes « mises au point » sur ces opérations. Dans cette interview accordée à Africaguinee.com, cet éminent juriste donne des clarifications sur les notions « domaines publics » et « domaines privés » de l’Etat ? Sur quelle base l’Etat peut-il être amené à « exproprier » un citoyen ? Quelles sont les chances de recours devant la justice ? Me Amadou Diallo précise. Entretien exclusif.
Comment comprenez-vous les opérations de récupération des biens immobiliers de l’État enclenchées par le CNRD ?
MAÎTRE AMADOU DIALLO : Dans cette affaire, il y a beaucoup de confusion entre les mots et les idées, autrement dit une confusion dans la communication et sur le régime juridique des biens immobiliers de l’État.
L’expression “récupération des biens” utilisée pour les biens qui sont en location ou qui font l’objet de baux (bail à construction et bail emphytéotique) n’est pas appropriée. En effet, ces biens qui sont toujours dans le patrimoine immobilier de l’État n’ont pas besoin d’être récupérés par ce qu’ils ne sont jamais sortis du patrimoine de l’État. On récupère ce qu’on a perdu. Pour cette catégorie de biens, c’est plutôt la gestion que l’État peut récupérer en résiliant les baux, les contrats de location, les permis d’occupation précaire. Tu ne récupères que ce dont tu es dépossédé. Mais l’État n’a pas été dépossédé. Celui qui a un contrat de bail a simplement l’usufruit, il n’a pas l’abusus c’est à dire qu’il ne peut pas disposer du bien. Il n’est pas propriétaire, l’État conserve la nue-propriété.
Par contre, les biens qui relèvent du domaine privé de l’État qui ont été régulièrement vendus n’appartiennent plus à l’État. Ils sont sortis du patrimoine immobilier de l’État. C’est le cas des immeubles achetés au prix du marché par les deux anciens Premiers ministres. Juridiquement, l’État ne peut se réapproprier ces biens qu’en procédant à une expropriation pour cause d’utilité publique (construction d’un ouvrage public : route, Hôpital, école etc..), après une juste et préalable indemnité. De même, pour récupérer une entreprise publique déjà privatisée, il faut la renationaliser.
Vous comprendrez que la situation des anciens Premiers ministres, qui sont chacun propriétaire de son domicile, est différente de celle des fonctionnaires qui sont en location ou qui bénéficient d’un bail à construction ou d’un bail emphytéotique.
La récupération des biens de l’État est-elle fondée en droit ?
Je pense que tous les Guinéens sont d’accord sur le principe de la récupération des biens de l’État, personne n’entend contrecarrer cela. C’est une bonne initiative de récupérer les biens de l’État qui sont illégalement ou irrégulièrement sortis du patrimoine de l’État. Mais encore faut-il respecter la loi et faire la différence entre les biens qui relèvent du domaine public et ceux qui relèvent du domaine privé.
C’est quoi la différence entre biens qui relèvent du domaine public et ceux qui relèvent du domaine privé ?
Le Code foncier et domanial adopté depuis 1992 qui définit le régime juridique applicable aux biens immobiliers de l’État distingue clairement deux catégories de biens : les biens relevant du domaine public et ceux relevant du domaine privé de l’État.
1 – Les biens du domaine public sont aussi de deux sous catégories. Il y a les biens du domaine public naturel (lacs, forets, cours d’eau, domaine public maritime etc..) et les biens du domaine public artificiel (Infrastructures : routes, ponts, aéroports, ports, hôpitaux, un stade, universités publiques, bâtiments publics etc..). Ces biens qui sont exclusivement destinés à l’usage du public sont inaliénables et imprescriptibles (Article 101 du CFD). Mais attention, certains biens du domaine public artificiel peuvent faire l’objet de location ou de concession. Par exemple, rien n’interdit à l’État guinéen de donner en concession l’aéroport de Conakry ou le port de Conakry ou de construire une autoroute à péage et de faire une concession de service public.
2 – Les biens qui relèvent du domaine privé de l’État sont, par contre, destinés à un usage privé et ils peuvent faire l’objet de vente ou de baux (villas de la cité ministérielle, villas occupées ou louer à des fonctionnaires, bail à construction et bail emphytéotique).
Le même code précise que le droit applicable aux biens qui relèvent du domaine public c’est le droit public (prérogatives de puissance publique) et les biens qui relèvent du domaine privé de l’État c’est le droit privé qui s’applique c’est à dire le régime juridique fixé dans le Code civil tel que précisé dans le Code foncier et domanial.
Les biens qui sont en train d’être « récupérés », les villas à la Cité ministérielle et autres c’est des biens qui relèvent du domaine privé de l’État qui sont différents des biens publics dont j’ai parlé tantôt. Ils peuvent faire l’objet de cession ou de vente. Donc, ils sont aliénables, à ce niveau, vous avez plusieurs catégories d’occupants. Il y en a qui occupent en tant que locataire parce qu’ils sont fonctionnaires, il y en a qui occupent parce que, peut-être, on leur a donné un logement de fonction puisqu’ils sont ministres. Il y en a à qui l’État a déjà vendu.
Puisque ces biens relèvent du domaine privé de l’État ils sont soumis à un régime juridique de droit privé donc au Code civil. Si l’État veut les récupérer qu’est-ce qu’il fait? Si tu veux récupérer un bien que tu as vendu, tu le rachètes. Quand l’État veut construire un ouvrage public sur la villa qu’il a déjà vendue, il engage une procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique. Cela suppose une indemnisation juste et préalable du propriétaire. D’abord, l’État n’a pas besoin de récupérer les biens du domaine privé ou du domaine public qui font l’objet de contrat de bail puisque c’est des biens qui lui appartiennent. Ce que l’État peut c’est de résilier les baux puisqu’ils sont déjà dans son portefeuille.
Supposons qu’un citoyen quelconque a un contrat de bail avec l’État. Comment l’État doit procéder s’il voulait récupérer le bien ?
Je pense que l’État doit examiner les contrats au cas par cas, en fonction de la nature du contrat et engager la procédure appropriée. Quand c’est la location, il faut qu’on soit d’accord que l’État est toujours propriétaire, le bien n’est pas sorti de son patrimoine. Même dans le cadre du bail à construction, avec une option d’achat à la fin du bail, l’État n’est pas obligé de céder. Même dans ce cas, l’État perçoit une redevance donc il y a une convention qui est négociée. Si l’État estime qu’il a été lésé dans ses droits, il peut demander à renégocier. Ou si le contrat est léonin c’est-à-dire préjudiciable aux intérêts de l’État, il peut demander au juge d’annuler le contrat, selon une procédure judiciaire régulière. Quand l’État se comporte comme un privé qui vend ou loue des biens relevant du domaine privé, c’est le régime juridique de droit privé qui s’applique.
Quelle est la place de la propriété dans le droit ?
Le droit de propriété est un droit fondamental. Il était considéré comme un droit sacré. Il figure en bonne place dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans la plupart des constitutions du monde. C’est un droit constitutionnellement protégé. Cette protection concerne aussi bien la propriété publique que la propriété privée. Quand il y a une atteinte au droit de propriété privé on considère que c’est une atteinte aux droits de l’homme qui peut même faire l’objet de recours devant la Cour de justice de la CEDEAO. Beaucoup d’hommes d’affaires obtiennent de crédits auprès du système bancaire en fournissant comme garantie leur titre de propriété c’est à dire les titres fonciers. Quand on veut remettre de l’ordre dans le patrimoine de l’État, il faut veiller à ne pas trop effrayer les investisseurs étrangers. Il faut faire en sorte que la loi soit respectée, parce qu’on ne peut rendre la justice sans respecter le droit. Il n’y pas de vide juridique, le Code civil et le Code foncier et domanial sont clairs en ce qui concerne le régime juridique applicable aux biens de l’État que ça soit des biens qui relèvent du domaine public ou du domaine privé. C’est la démarche qui est condamnable. Ce n’est pas pour rien qu’il y a beaucoup de voix qui se sont élevées pour contester la manière. Le principe lui-même ne pose pas de problème. Tous les Guinéens voudraient que le patrimoine de l’État soit préservé, mais il faut gérer les choses au cas par cas. Il faut aussi qu’on respecte la présomption d’innocence. Les fonctionnaires qui sont en location ou qui ont acheté des biens relevant du domaine privé, ils ne sont pas tous malhonnêtes. Il faut vérifier au cas par cas. Ceux qui se sont irrégulièrement installés, il faut les expulser, mais en y mettant la forme.
Qu’en est-il du cas de Cellou Dalein Diallo et de Sidya Touré qui sont sommés de quitter leurs domiciles respectifs au plus tard le 28 février prochain ?
Sur le plan juridique, le courrier du directeur du Patrimoine bâti public manque totalement de base légale. Il ne s’appuie sur aucun titre exécutoire. Il n’est fondé ni en droit, ni en équité. La demande de quitter est une mesure manifestement illégale qui vise à éteindre un droit de propriété, en réalité c’est une voie de fait. Dans un régime qui dit que la justice est la boussole, le droit devrait en être l’instrument.
Dans une procédure normale que devrait faire le patrimoine bâti ?
Normalement, le directeur du patrimoine bâti public ou les personnes chargées de récupérer ces biens auraient dû demandé à tous les occupants des domaines publics ou privés de l’État de communiquer les documents justificatifs, les titres de propriété, les contrats sur la base desquels ils occupent ou gèrent les biens. Qu’il s’agisse d’un contrat de bail ou de location, d’un titre de propriété, chacun vient avec ses dossiers devant une équipe pluridisciplinaire pour examiner les dossiers au cas par cas. Si on trouve que quelqu’un occupe illégalement un terrain relevant du domaine privé de l’État, on saisit le juge qui ordonne son expulsion. Même l’Administration peut expulser après avoir examiné les dossiers des occupants précaires du domaine public ou les occupants illégaux (sans titre) du domaine privé. Si c’est quelqu’un qui a un titre de propriété, tant que ce titre n’est pas annulé par la justice celui-ci bénéficie de la protection de la loi. L’État n’a pas le droit de le troubler dans sa jouissance à fortiori de l’expulser sans un titre exécutoire définitif( Jugement ou Arrêt).
Est-ce que les victimes ont une possibilité de recours devant la justice?
Sur le plan juridique, un citoyen confronté à une mesure administrative illégale a le choix entre plusieurs types de recours, au plan national :
1 – un recours administratif qui peut être un recours gracieux lorsqu’il s’adresse à la même autorité qui a pris la décision en l’espèce le directeur du patrimoine bâti public ou un recours hiérarchique lorsqu’il s’adresse au supérieur hiérarchique du directeur du patrimoine bâti public. Ici l’objectif visé, dans le premier cas, c’est d’amener l’auteur de la décision de revenir sur elle c’est-à-dire de se rétracter et, dans le second cas, c’est l’annulation ou la reformation de la décision par le supérieur hiérarchique. Ce type de recours n’est pas obligatoire, sauf en matière fiscale ;
2 – un recours en annulation, c’est-à-dire un recours pour excès de pouvoir (REP), devant la chambre administrative de la Cour suprême, accompagné ou non d’une demande de sursis à l’exécution de la décision administrative faisant grief. Ici, l’objectif visé c’est l’annulation de l’acte administratif et, s’il y a lieu, la suspension provisoire de son exécution ;
3 – Un recours devant le juge de référé territorialement compétent pour faire face à une situation d’urgence, notamment faire cesser le trouble à la jouissance paisible d’un bien ou d’un droit…et ordonner des mesures provisoires pour prévenir un dommage imminent ou tout simplement préserver les droits civils d’un citoyen menacés de violation comme la présomption d’innocence et l’inviolabilité du domicile.
4 – Avant d’être dépossédé irrégulièrement de son bien, le détenteur d’un Titre Foncier peut faire une assignation en reconnaissance de propriété et de paiement de dommages et intérêts devant le Tribunal territorialement compétent ;
5 – Après avoir été dépossédé irrégulière de son bien, le détenteur d’un Titre Foncier peut faire une assignation en revendication de propriété et paiement de dommages et intérêts devant le Tribunal territorialement compétent.
Est-ce qu’un recours a les chances de prospérer ?
Théoriquement, la justice est indépendante. Son rôle c’est de pacifier la vie dans la Cité en offrant à tous les citoyens la garantie juridictionnelle qui s’impose. C’est pourquoi, j’ai rappelé plus haut qu’il y a eu beaucoup de confusion dans la communication et dans la situation des biens immobiliers de l’État. Il (Colonel Amara Camara, Ndlr) a visé l’article 101 du Code foncier et domanial qui dit que les biens de l’État sont inaliénables et imprescriptibles. Mais cette disposition ne concerne que les biens des domaines publics naturels et artificiels. Or, les villas qui se trouvent à la Cité ministérielle, à Dixinn ou à la Miniere ne font pas partie du domaine public artificiel. Ces biens relèvent du domaine privé de l’État et ils peuvent faire l’objet de cession. L’opération de récupération manque de discernement. On met tout le monde dans le même sac. La situation juridique des personnes ou des biens n’est pas la même. Le traitement doit être fonction de la situation juridique des biens et des personnes qui les occupent. Un bien du domaine public est différent d’un bien du domaine privé. De même, une personne locataire ou bénéficiaire d’un bail à construction ou d’un bail emphytéotique est dans une situation juridique différente de celle d’une personne propriétaire et détentrice d’un Titre Foncier. Il faut un traitement différentiel pour des situations différentes et un traitement non discriminatoire (Egalite de traitement) pour les situations identiques.
Avec Africaguinee
Tiekourani,
le caca de mon chien est plus important pour moi que cette affaire foncière.
Je ne sais pas pourquoi je vais gaspiller mon temps à lire ce verbiage creux et inutile. Il y a des lectures plus importantes à faire que ce galimatias qui ne t’apprend rien.
L’avocat là est un militant de l’ufdg. Il ne peut pas dire la vérité. Tout ce qui émane de l’ufdg n’est pas crédible à mes yeux.
Tiekourani. Demande une fois encore à ton avocat si ccd pouvait acheter cette demeure.
Par ailleurs, il faut ouvrir Le débat sans tabous dans ce pays.
On progresse par ratures frcondes (Francis bacon). Hommes d’affaires … ils créent combien d’emplois même l’oligarchie russes à su créer des entreprises solides. On se fait la belle sur le dos de la population..
Tiekourani,
Personnellement je ne connaissais pas cette émission « Les Grandes Gueules » que je pratique depuis quelques semaines. Ce sont exactement le type de médias et d’émissions que nous avons besoin pour bâtir une vraie démocratie chez nous et surtout pour moraliser la gestion de la chose publique. C’est indispensable. Je les encourage et je souhaite que d’autres radios s’invitent dans ce créneau. Ces émissions nous changent franchement de l’ORTG.
Effectivement Monsieur Sylla Mory, être avocat c’est beaucoup de paroles mais si ces paroles ont un sens comme ici il faut en tenir compte. Faire ça c’est être un homme de principe et donc un homme bien. Lis bien Maître Diallo car c’est un vrai cours de droit qu’il donne ici. Je suis prêt à lire tout contradicteur de cette contribution mais qui utilse le droit. Là où je suis, je cherche à avoir une contribution à la hauteur de celle-ci de la part des conseils des gros bras. Le cnrd n’est plus légitime pour moi. Pour l’instant ils imposent… Lire la suite
Jacques, je me demande si toi tu sais ce qu’on appelle éthique. Sinon tu n’allais pas dénigrer des personnes sur la base des choses que tu ne connaîs du tout. En plus, pour ta gouverne, je n’ai pas encore eu l’honneur d’avoir Mâitre Diallo comme mon conseil. Tu sais Jacques, moi je ne suis pas ici seulement pour donner mon opinion. Je suis ici ausi pour échanger avec mes compatriotes et surtout pour apprendre et comprendre mon pays dans tous ses aspects. Jacques vas apprendre. Foulou, Senghor nous avait dit que l’émotion est nègre et la raison est Helène. Cela… Lire la suite
Tiekourani
Ils sont rares les medias qui invitent les spécialistes d’un domaine ,et si par chance on t’invite les journalistes pour faire impressions ils t agressent ni plus ni moins.
Ils manquent de cultures generales .
Les gens les ecoutent fautes de communications des gens du pouvoir.
Erreur conseillé
Tiekourani. Mais demande à ton avocat de parler avec code du droit. Si on peut être vendeur et acheteur à la fois. Le nœud de cette affaire se trouve à ce niveau. La position de ccd au moment de l’achat. Il à habité cette maison en tant que ministre. Il a été mal consulté pour moi. Il a d’autres maisons et terrains ou il n’y a pas problèmes. En plus il y a une question éthique quand on pretend à la présidence de la République. Je redis encore resserrer les rangs pour les élections. Bonne journée
Être avocat,c’est beaucoup de paroles.
Des milliers de tonnes de paroles.
Jacques si tu es vraiment honnête sort nous la loi qui définit ceux qui doivent soumissionner lorsque l’Etat vend. Tu écoutes les gg d’espace tv où on n’apprend plus rien qui séme la confusion dans la tête des guinéens pour dire du n’importe quoi sur cette analyse scientifique de cet avocat. Lui il parle avec des lois et toi tu attaques sans preuve. Dépuis que cette affaire a commencé les gg n’ont jamais invité un juriste pour expliquer la situation. Ils se cantonnent à des monologues stériles pour déverser leur haine contre des personnes. Ils ont complètement détruit cette émission… Lire la suite
@Jacques
L’avocat t’explique le droit et tu continues a substituer tes emotions a la regle de droit.
Maitre. Vous faite la langue de bois. L’état vend mais vente publique mais ceux qui représentent l’état ne peuvent pas soumissionner ni leurs proches. Ça n’a pas été fait des les règles avant comme maintenant. Tous les amis de ccd ont refusé de lui dite la vérité mais voilà cette maison n’est absolument rien il aurait dû aller plus tôt. Maitre expliquer le conflit d’intérêt dans cette venté.
Explication claire et nette même pour nous qui ne sont pas des juristes. Ces gros bras sans cervelle confondent tout.