Ces derniers jours, en raison des délestages persistants du courant électrique, la Guinée est en proie à une vague de colère dans certains quartiers de Conakry et des régions reculées du pays. Les jeunes, frustrés par cette situation, ont érigé des barricades, perturbé la circulation, incendié des pneus sur les routes, lancé des projectiles sur les passants et leurs véhicules, et affronté les forces de sécurité, entraînant malheureusement des pertes humaines tragiques. Ce climat d’agitation met en évidence la nécessité urgente de distinguer les revendications légitimes de l’incivisme, dans un contexte où la population exprime un mélange complexe d’espoir pour l’avenir et de désespoir face aux défis actuels.
Au cœur de cette agitation, il est essentiel de séparer les véritables revendications légitimes des actions destructrices de l’incivisme. Que ce soit pour dénoncer les délestages, la corruption, réclamer des réformes démocratiques, mettre fin à la transition militaire, ou rétablir l’ordre constitutionnel, le défi reste le même : comment exprimer la colère de manière constructive, sans basculer dans la violence et le chaos ?
Les politiciens, ces marchands du chaos, agissent dans l’ombre et cherchent souvent à exploiter ces mouvements populaires à leurs propres fins. En attisant les tensions et en détournant l’attention des véritables problèmes vers des querelles partisanes, ils trahissent les aspirations du peuple au profit de leurs intérêts personnels.
Face à ces manifestations, nos forces de l’ordre répondent parfois, sinon très souvent, de manière disproportionnée, alimentant ainsi le cycle de la violence et renforçant le sentiment d’impunité et d’injustice. Parallèlement, les promesses de réformes et d’enquêtes semblent souvent vaines pour les familles endeuillées, accentuant leur désillusion.
Dans le cas spécifique des délestages, les explications rationnelles du gouvernement ne parviennent pas à apaiser les tensions. Au contraire, elles peuvent parfois être contradictoires, accentuant ainsi la frustration et le désespoir des citoyens. Par exemple, les déclarations contradictoires du Premier Ministre et du directeur de l’entreprise publique, Electricité De Guinée, sur l’état des barrages hydroélectriques illustrent l’importance cruciale d’une communication transparente et cohérente de la part des autorités. Alors que le Premier Ministre a affirmé que les barrages étaient asséchés, justifiant ainsi les délestages, le directeur de l’entreprise publique a contredit ces propos en indiquant qu’il y avait en réalité un problème sur les lignes des barrages, gérées par des entreprises chinoises, et qu’un problème de communication avait entraîné une incompréhension entre les Guinéens et les Chinois. Cette confusion dans les explications officielles souligne l’urgence d’une communication transparente et unifiée pour restaurer la confiance et apaiser les tensions dans la société guinéenne.
Les manifestations peuvent être des moments cruciaux dans la lutte pour le progrès et la justice, mais seulement si elles sont menées avec sagesse et détermination. Les jeunes de Guinée ont le pouvoir de transformer leur colère en une force constructive pour le changement, en faisant entendre leur voix à travers la clarté de la conviction et le courage de l’action pacifique.
Dans cette période tumultueuse, les jeunes de Guinée sont confrontés à un choix crucial : se laisser emporter par la colère et la frustration, ou embrasser un chemin plus noble et constructif vers le changement. Est-ce que la destruction de biens publics et les affrontements avec les forces de l’ordre sont le reflet de notre véritable désir de progrès ? Est-ce que céder à la violence nous rapproche de nos aspirations pour un avenir meilleur ? Ne sommes-nous pas capables d’adopter des méthodes pacifiques et intelligentes pour exprimer nos préoccupations et revendications ? En nous unissant autour de valeurs de respect, de tolérance et de dialogue, ne pourrions-nous pas construire un avenir où chacun trouve sa place et où la justice règne ?
Le temps est venu pour nous, jeunes de Guinée, de faire preuve de maturité et de responsabilité. Levons-nous avec détermination, mais faisons-le avec sagesse et dans le respect des principes fondamentaux qui guident notre société. C’est en travaillant ensemble, avec conviction et détermination, que nous pourrons véritablement transformer notre colère en une force constructive pour le changement.
Ousmane Boh Kaba