La bauxite de Guinée va-t-elle faire les frais des sanctions américaines contre Rusal ?

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Oleg Deripaska, proche du président russe Vladimir Poutine et actionnaire majoritaire de UC Rusal, figure parmi les 24 personnalités russes sanctionnées par les États-Unis. L’entreprise est un acteur majeur de l’exploitation de la bauxite en Guinée.

Le vendredi 6 avril, l’administration américaine a annoncé des sanctions contre 24 personnalités russes, et en particulier Oleg Deripaska, actionnaire majoritaire du numéro un mondial de l’aluminium Rusal, déclenchant un énorme bouleversement du secteur : à la Bourse de Hong-Kong, la valeur de l’action de Rusal a été divisée par trois, passant de 4,64 dollars de Hong-Kong (0,48 euros) le 6 avril à 1,43 dollars de Hong-Kong le 16 avril.

Autres conséquences, depuis ce mardi 17 avril, les lingots d’aluminium estampillés UC Rusal ne peuvent plus servir de garantie dans les transactions boursières de la London Metal Exchange (LME), tandis que les partenaires traditionnels de l’entreprise, tels Glencore et Rio Tinto, ont annoncé leur intention de « revoir leurs relations commerciales » avec le géant russe, en vue de respecter les sanctions américaines.

Selon une analyse publiée sur LinkedIn par Paul Robinson, directeur du cabinet spécialisé dans les matières premières CRU, 31 % des ventes du géant minier en 2016 sont passées par le courtier Glencore, dont le directeur général, Ivan Glasenberg, a claqué la porte du conseil d’administration de Rusal.

Le ministre des Mines rassurant

Une situation qui ne manque pas d’inquiéter en Guinée, un pays qui détient la moitié des réserves mondiales de bauxite, et dont Rusal a fait un partenaire « stratégique », avec des investissements « colossaux », analyse le journaliste guinéen Akoumba Diallo, spécialiste des questions minières.

Abdoulaye Magassouba, ministre guinéen des Mines et de la Géologie, se veut pourtant rassurant. Interrogé par Jeune Afrique sur les conséquences des sanctions américaines sur les activités de Rusal en Guinée, il a assuré « ne pas avoir de problème particulier avec l’investisseur Rusal » et être « tenus par nos engagements contractuels ».

Rusal s’apprête en effet à exploiter l’année prochaine la mine de bauxite de Dian-Dian (un investissement de 220 millions de dollars), à Boké (nord-ouest du pays) qui permettra de doubler les 3,5 millions de tonnes de bauxite qu’elle produit chaque année en Guinée à travers la Compagnie des bauxites de Kindia (CBG).

Rusal projette également de relancer sa raffinerie d’alumine Friguia, à l’arrêt depuis 2012 suite à une grève des travailleurs, pour un coût estimé à 825 millions de dollars. L’usine devrait redémarrer avec une production annuelle 650 000 tonnes pour atteindre 1,05 million de tonnes en 2026.

Mais sans accès à ses liquidités, boycottée par une grande partie de ses clients et fuie par ses actionnaires, l’entreprise pourra-t-elle tenir ses engagements ? Amadou Diallo, directeur exécutif de l’ONG Actions mines Guinée, met l’accent sur les conséquences des sanctions en terme de réduction de mobilité des fonds et de restriction des activités commerciales du patron de Rusal. Et de souligner que ses compagnies en Guinée « dépendent de la société mère cotée à des bourses occidentales ». Pour lui, c’est une certitude : « Il y aura des impacts à court ou à moyen terme. »

Hausse des prix

Inquiétantes pour Rusal, les sanctions américaines pourraient se révéler une aubaine pour ses concurrents : en effet, depuis le 5 avril, le cours de l’aluminium à la LME a augmenté de 15 % pour atteindre 2 292 dollars (1 854 euros) la tonne. Un effet dont pourraient profiter la Compagnie des bauxites de Guinée, détenue par l’État et le consortium Halco Mining, qui regroupe Rio Tinto Alcan, Alcoa et Dadco, qui exploite un gisement à Sangareti, et la Société minière de Boké (SMB), pilotée par China Hongqiao Group, qui a démarré son exploitation en août 2015.

Si d’autres projets sont dans les cartons dans la région de Boké (nord-ouest), portés par les Français d’AMR, les Chinois de Henan International Mining et de China Power Investment et les Emiratis d’ Emirates Global Aluminium (EGA), aucune de ces productions n’est encore lancée.

 

Avec JA

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Nfamara
Nfamara
23 avril 2018 23:37

Les vadrouilles incessantes entre deux jets privés pour jouer au figurant semblent relever du passé.Les pérégrinations du Président cosmopolite l’empêchaient d’être en phase avec les contingences locales ..

Shams Deen
Shams Deen
22 avril 2018 20:26

La Chine pays communiste est et reste l’ESPOIR du monde entier et ce pour longtemps encore.
La présence du PRAC s’explique par le fait que le passeport est encore confisqué par CDD après Soumah SLEG.

Mosaic
Mosaic
21 avril 2018 09:28

La Chine seul espoir du PPAC

AOT Diallo
AOT Diallo
17 avril 2018 17:42

Au vu de la situation de risques et menaces contre les oligarques russes qui a commencée bien avant cette décision finale de Trump ceci expliquerait bien en grande partie l’arrêt quasi-total du PPAC voyageur depuis janvier 2018 : tous les jets privés affrétés par notre Magellan étaient « offerts » par Deripaska en échange d’avantages miniers indécents a Fria et Dian-Dian…