Petite réplique au Pr. Koutoubou Sanoh dans « l’affaire Imam Nanfo Soumaila Diaby » (Par Ismael Souare)

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Dans un papier publié sur plusieurs sites dont Gbassikolo.com, titré « Non, mon cher frère Nanfo, la prière en malinké est illégale et invalide!! », le Pr. Koutoubou Sanoh s’est dit « peiné par la témérité inexplicable » de l’Imam Nanfo Soumaila Diaby, et son « refus obstiné d’arrêter de prier et faire prier en langue malinké ». Il s’en suit alors une répétition ennuyeuse et monotone de plainte du genre :« je suis outré, scandalisé, consterné, atterré, outré, écœuré…»! Car pour lui, toute prière faite dans une autre langue que la langue du Coran (Arabe) est « invalide et illégale » et que par voie de conséquence, « prier en malinké ou en une autre langue est invalide, nul et de nul effet ! ».

 S’il faut lui concéder le droit de s’offusquer on ne peut cependant s’empêcher de relever quelques amalgames dans ce papier.

L’amalgame ici consiste à faire croire qu’en raison de la place prépondérante qu’occupe l’Islam en République de Guinée (88 ou 90 % selon les sources), le droit musulman* ferait partie du droit positif** guinéen, à tel point que, le non-respect de certaines « traditions » ou recommandations relatives aux pratiques de l’Islam peuvent ou doivent être interprétées comme des infractions à la loi !

Il ne le dit pas expressément mais en considérant le fait de prier ou de faire prier en langue malinké comme une pratique « illégale », on est en droit de s’interroger sur la place et le rôle des normes à caractère religieux dans la hiérarchie des normes juridiques de notre pays. Autrement dit, les règles relatives aux pratiques de l’Islam font-elles partie intégrante des normes juridiques de notre pays ?

Il faut peut-être préciser de passage que le Dr. Koutoubou Sanoh est un juriste doublé d’un commis de l’Etat, ayant une certaine expertise quant à l’organisation et le fonctionnement des institutions dans des Etats dits républicains !

Dès lors le recours au terme « illégal » pour dénoncer une forme d’exercice du culte religieux – certes différente de celle répandue – mais qui, à mon avis, ne viole aucune loi de la République, me parait excessif et inapproprié.

En tout état de cause, les spécialistes du droit s’entendent à définir l’illégalité comme étant le caractère d’un acte ou d’un fait qui n’est pas conforme à la loi c’est-à-dire à l’ensemble des règles juridiques applicables dans un pays donné à un moment donné. Ce qui implique que la légalité se confond avec le droit positif et qu’il convient donc, lorsque l’on examine la légalité d’un acte, de le confronter non seulement à la loi formelle, mais à l’ensemble des dispositions du droit en vigueur concernant l’activité dont il s’agit.

Et, sauf erreur de ma part, je n’ai relevé nulle part dans le texte du Pr. Sanoh, un passage faisant mention d’une disposition légale concrète en vigueur en République de Guinée qui serait violée par l’Imam Diaby. Or, en tant qu’ancien Ministre secrétaire général des affaires religieuses de la République de Guinée de 2009 en 2010, il aurait été beaucoup plus crédible s’il avait porté à la connaissance du public l’arrêté règlementaire ou les dispositions constitutionnelles qui régissent l’exercice du culte religieux en Guinée et qui seraient violées par l’Imam Diaby. Hélas !

On peut donc légitimement se demander, en quoi est-ce que le fait de prier ou de faire prier en langue malinké serait-il illégal ? En d’autres termes, quelle est la disposition légale violée ici ?

En attendant que le Pr. Sanoh nous le dévoile, il me parait fondamental de rappeler cette disposition de la Constitution (qu’elle soit celle de 2010 ou celle de 2020), disposant dans son article premier, que « la Guinée est une République laïque. (…) Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction (…), de religion et d’opinion. Elle respecte toutes les croyances. (…) L’État assure la promotion des cultures et des langues du peuple de Guinée.

A mon avis, c’est fort de cette disposition constitutionnelle ainsi que de celles relatives à l’article 7 ( Const. 2010) ou l’article 11 (Const. 2020), l’article 14 (Const. 2010) ou 11 (const. 2020) ** que notre compatriote a pris la décision de pratiquer sa foi religieuse dans la forme qu’il a estimée plus appropriée.

Par mépris ou ignorance de ces dispositions constitutionnelles cependant, l’Etat guinéen, à travers une note circulaire (avec sigle-entête de la République de Guinée) de trois ligues islamiques de la région de Kankan, datée du 10 juin 2019, avait suspendu le célèbre chroniqueur de toutes les activités religieuses à Kankan. Ce, en violation flagrante du principe de la laïcité qui implique la neutralité de l’Etat et impose l’égalité de tous devant la loi sans distinction de religion ou conviction ! Il n’est superflu de rappeler ici que ces mesures discriminatoires (note circulaire des ligues religieuses) sont une violation flagrante de l’article 8 (2010) ou 9 (2020)   de la Constitution qui dispose que Nul ne doit être privilégié ou désavantagé en raison de ses croyances et de ses opinions politiques, philosophiques ou religieuses.

Ces mesures d’exclusion avaient alors incité certains extrémistes à persécuter l’Imam Diaby qui s’est vu sommé par son logeur de libérer la Concession qu’il habitait, prétextant qu’il ne peut garantir sa sécurité et celle surtout de la concession.

Par ailleurs, en ordonnant le 11 juillet dernier son l’arrestation, l’Etat guinéen à travers le préfet de Kankan, a privé l’Imam Diaby de sa liberté pendant plusieurs heures pour une infraction qui n’existe nulle part dans le Code pénal guinéen !

En somme, l’Imam Nanfo Soumaila Diaby a été manifestement victime d’actes et faits illégaux de la part, successivement de l’Etat à travers ses ligues religieuses, des extrémistes religieux qui s’en sont pris à ses biens et failli attenter à sa vie, des organisations de la société civile et partis politiques d’opposition qui jurent pourtant de défendre la constitution contre « tout tripatouillage  ou violation» mais qui n’ont pas encore levé le petit doigt pour dénoncer cette violation flagrante des droits du citoyen Nanfo Soumaila Diaby et enfin des intellectuels de la catégorie du Pr. Koutoubou Sanoh qui, par ignorance ou par démagogie, se permettent de balancer des accusations d’infraction à la loi l’encontre d’un citoyen, sans même daigner en faire la moindre démonstration.

Ismael Souare

Fondateur du site Gbassikolo.com


* L’expression « droit positif » désigne l’ensemble des règles de droit effectivement en vigueur dans un Etat ou un ensemble d’Etats. (…)
Le droit positif est écrit et publié. Son respect est sanctionné par le recours aux juridictions chargées de l’appliquer. Il est constitué de l’ensemble des documents juridiques officiels : lois, décrets, règlements administratifs, règles de procédure et jugements.  (http://www.toupie.org/Dictionnaire/Droit_positif.htm)

**Article premier. La Guinée est une République  (…), laïque, démocratique et sociale.

Article 7. Chacun est libre de croire, de penser et de professer sa foi religieuse, ses opinions politiques et philosophiques…

Article 14. Le libre exercice des cultes est garanti. Les institutions et les communautés religieuses se créent et s’administrent librement.

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Sékou Fakoly Doumbouya
Sékou Fakoly Doumbouya
29 juillet 2020 08:31

Je pense bien que Nanfo n’a jamais empêché quelqu’un de prier en arabe.

Il faut simplement laisser les gens prier comme ils veulent. Car c’est un problème purement personnel.

Tiekourani
Tiekourani
28 juillet 2020 08:26

Ah ces nègres,c’est vraiment ridicule. Ici ils parlent de tolérance alors que de l’indépendance à maintenant ils n’ont créé que des Républiques bananières de la trempe de Haiti ou de la Guinée.Ils n’expriment leur patriotisme que pour rouspecter ou pour tuer ou pour diviser les africains mais jamais pour construire. Tous les peuples de cette terre ont subi à un moment donné de leur histoire la domination mais voyez vous sur cette terre des peuples se paindre à longueur de journée. Les autres travaillent et nous, nous pleurnichons. Tantôt, c’est les français,les occidentaux, maintenant c’est les arabes alors que moi… Lire la suite

Aboubakar
Aboubakar
28 juillet 2020 02:04

La ligue islamique a t elle le pouvoir de contrôler partout la pratique de l Islam? Et si Nanfo crée la ligue islamique N’ko qui peut l attaquer? Il y a beaucoup de syndicats sous nos yeux. Il y a une ligue pour les chrétiens et une pour les animistes. Les Chiites disent qu un autre prophète viendra et cela est inacceptable pour les Sunnites. Est ce que la ligue islamique peut interdire à un citoyen de prier comme il veut dans son propre domicile et lui interdire la parole dans les lieux publics? Je ne prie pas comme lui… Lire la suite

Black
Black
25 juillet 2020 21:57

L’islame n’est pas une marque déposee,donc on peut prier dans La Langue qu’on veut. La Lique islamaique de Guinee n’est pas habilite a interdire a qui que ce soit de prier en prive ou en Publique comme il veut et dans la Langue qu’il veut

Sékou Fakoly Doumbouya
Sékou Fakoly Doumbouya
25 juillet 2020 19:44

@Kaou Labé
Je pense bien que le mot arabe « Allah » (origine araméenne) n’est pas une marque déposée dont l’utilisation est exclusivement réservée aux arabes ou aux arabophones.

« Allah » fait partie du vocabulaire mandingue d’aujourd’hui. Par conséquent on peut bien dire « Allah le Kabon » sans déranger quelqu’un.

MBemba
MBemba
25 juillet 2020 15:37

AMMA, également appelé AMOUN, AMEN, AMEEN, AMINA est le Créateur Suprême, le Caché, l’invisible; est aussi la plus ancienne appellation connue des peuples (en Maninka) Madingues, des ancêtres depuis Soudan Méroïtique, Ethiopie des Anciens.
Représenté souvent le part le crescent de la lune, le Bélier; le reste est à vous de ……
Le Coran traduit en NKo a gardé intégralité de la version Arabe raison pour laquelle les autorités islamiques de l’Arabie Saoudite/Mecque l’ont (après 3 ans d’études) approuvé.

Merci!

Youssouf Bangoura
Youssouf Bangoura
25 juillet 2020 09:00

Koutoubou professeur !!! Heureusement qu’il n’a pas été mon prof sinon mon esprit serait beaucoup tordu qu’il ne l’est aujourd’hui . Je ne trouve aucune qualité à des prof qui raisonnent comme un analphabète, Koutoubou ressemble plutôt à un cultivateur de son village qui n’a jamais su penser par soi-même . Ce sujet ne doit même pas faire un débat, il suffit juste de se demander pourquoi prie-je dans une autre langue que la mienne ? Même Dieu sait qu’une langue est le meilleur outil pour comprendre et connaitre tous les éléments de la nature y compris la religion .C’est… Lire la suite

Kaou Labe
Kaou Labe
25 juillet 2020 07:53

Merci infiniment Mr Doumbouya !
 » MANGALA LE KA BON  » et tout rentre dans l’ordre !
OUF !

Sékou Fakoly Doumbouya
Sékou Fakoly Doumbouya
24 juillet 2020 17:32

Pour ceux qui veulent le savoir !

Dans la tradition mandingue ! Le Dieu créateur est « Mangala ». J’ai connu ce mot depuis mon enfance.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Mythe_de_la_cr%C3%A9ation_du_monde_malink%C3%A9

Je ne crois pas qu’il existe une langue qui n’a fait aucun emprunt aux autres, donc, on peut bien dire Allah en malinké.

Allah « en arabe » viendrait aussi de l’araméen « āllāhā ».

https://fr.wikipedia.org/wiki/Allah#:~:text=Le%20mot%20aurait%20ensuite%20%C3%A9t%C3%A9,%C2%AB%20Mon%20Dieu%20%C2%BB%20en%20h%C3%A9breu.

Tronka
24 juillet 2020 16:27

@ Ismaël Souaré Très belle réplique de l’administrateur. Dans l’esprit de beaucoup de gens, la religion consiste à imiter de façon stéréotypée et dogmatique tout ce qui est arabisant. J’ai beaucoup de respect pour l’intelligence de Mr Sanoh Koutoubou mais je suis en désaccord total avec lui. Mr Koutoubou fait office de juge et met ainsi Mr Nanfo Ismaila sur le banc des accusés et non recommandés sans aucune preuve et de toute façon, il n’y a aucun document établi qui interdit la prière dans une autre langue. Je pratique la religion depuis mon enfance, mais je déteste au sens… Lire la suite

Kaou Labe
Kaou Labe
24 juillet 2020 13:40

Salam Mbemba ,
ALLAH en Arabe (Mahomet) ou en Araméen (Jésus ), importe peu .
COMMENT dit-on ALLAH en MANINKA ?
That’s the question ?
Bien à vous !

MBemba
MBemba
24 juillet 2020 13:08

Just une question aux Gbassikolonautes: ALLAH est il une appellation Arabe ou Araméen? T. Diallo dit: « Quitte l’islam et consacre toi à l’idolatrie que tes aïeuls auraient pratiquée. » Voici un peux ce que dit Cheick Anta Diop de nos aïeuls « Le nègre ignore que ses ancêtres, qui se sont adaptés aux conditions matérielles de la vallée du Nil, sont les plus anciens guides de l’humanité dans la voie de la civilisation ; que ce sont eux qui ont créé les Arts, la religion (en particulier le monothéisme), la littérature, les premiers systèmes philosophiques, l’écriture, les sciences exactes (physique, mathématiques,… Lire la suite

Kaou Labe
Kaou Labe
24 juillet 2020 10:39

@ Mr Souare , Je crois que vous vous en prenez à Mr Koutoubou LE JURISTE ! Vous êtes tout à fait compréhensible sous cet angle . Mr Diaby , CITOYEN GUINÉEN , est protégé par LA LAÏCITÉ de cet état . Point de doute ! A mon avis , c’ est Mr Koutoubou LE MUSULMAN , qu’ il faut COMPRENDRE ici . Essayez sous cet angle . SVP ! Juste une question : Mr Diaby dirige les prières dans sa mosquée en Maninka ; Pourquoi dit-il ALLAH le ka bon ? Sachant que ALLAH est l’ appellation ARABE de… Lire la suite

T.Diallo
T.Diallo
24 juillet 2020 07:39

Koto Souaré, j’ai eu exactement les mêmes sentiments que toi quand j’ai lu le texte ultra condescendant de Koutoubou Sano et je ne peux qu’être d’accord avec ton analyse au sujet du comportement de l’Etat qui a clairement violé les droits du citoyen Nanfo! Quant à la ligue islamique, garante du respect absolu des règles de l’Islam je crois qu’elle est dans son plein droit de suspendre l’imam Nanfo et de lui interdire de diriger des prières publiques. En privé, il peut faire comme il veut. C’est un peu comme un enseignant qui s’obstinerait à enseigner en Soussou par exemple… Lire la suite

Black Kante
Black Kante
23 juillet 2020 21:52

je partage totalement votre analyse/Replique!